La politique est un jeu de patience et surtout de communication. La semaine dernière, les opposants à StopCovid s’étaient mobilisés à coup d’études et de petites phrases présidentielles ou parlementaires pour enterrer l’application. Le gouvernement a laissé passer l’orage et a sonné la charge lors d’un week-end très dense en annonces.
Les « oui mais » de la Cnil, du Conseil scientifique et du CNnum
L’exécutif a consulté largement autour de l’application de « contact tracing » pour connaître l’avis des scientifiques et des spécialistes du numérique et de la protection des données personnelles. Le CNNum a été le premier à rendre son avis en se déclarant favorable à StopCovid. Pour autant, le conseil ne donne pas un blanc-seing au gouvernement en donnant 15 recommandations (création d’un comité de pilotage ayant pouvoir d’arrêter l’application, changer de nom en « AlerteCovid », accompagner les éloignés du numérique...).
Le Conseil scientifique s’est lui aussi déclaré favorable à l’usage du numérique dans la mise en place du déconfinement. Pour lui, il s’agit d’un élément très utile de la stratégie de contrôle de l’épidémie. Nonobstant, une application devra impérativement être associée « avec une plateforme téléphonique dont la fonction sera de répondre de manière personnalisée sur la conduite de l’isolement et les accompagner et de les soutenir dans cette perspective ».
La position la plus attendue était certainement celle de la Cnil. Gardien du temple de la vie privée, son avis a été publié dimanche, chose assez rare dans l’histoire de l’institution. Elle rappelle d’ailleurs dans son avis que ce type d’applications posent « des questions inédites en termes de protection de la vie privée ». En conséquence, les sages enjoignent le gouvernement « à la plus grande prudence » tout en soulevant les limites à ne pas dépasser. L’application doit être temporaire, sur la base du volontariat, largement disponible (ce qui peut poser un problème sur les smartphones Apple). La Cnil a validé le dispositif technique de StopCovid en considérant que « les protections prises apportent un haut degré de garantie pour minimiser le risque de réidentification des personnes », tout en réclamant un descriptif plus précis. Enfin, dans son avis, elle rappelle au gouvernement que la Commission devra être à nouveau saisie pour avis dans le cadre de la prochaine loi.
Un écosystème technique autour de StopCovid
Après les quitus des différentes organisations et institutions, le gouvernement a activé l’étage technique de l’application. Cédric O, secrétaire d’Etat au numérique, a dévoilé dans un entretien au Journal du Dimanche, les acteurs qui participeront à la création de StopCovid. Piloté par l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique), le projet comprend la participation de l’ANSSI (pour les questions de sécurité), l’Inserm, Capgemini, Dassault Systèmes, Orange, de la start-up Lunabee Studio, spécialisée dans le développement d’applications mobiles et de Withings, expert des objets connectés.
Chacun a un rôle particulier. Ainsi, Capgemini sera en charge de l’architecture et du développement back-end de l’application. Dassault Systems avec Outscale a été choisi pour l’infrastructure cloud labellisée SecNumCloud par l’ANSSI. Orange se voit confier la diffusion de l’application et l’interopérabilité. D’autres entreprises ont fait part de leur volonté de contribuer à StopCovid, « soit par la participation à des groupes d’experts techniques, à des groupes de réflexion, la mise à disposition de codes open source, le partage de retours d’expériences sur des solutions comparables, ou encore la participation aux expérimentations de terrain, ... », peut-on lire sur le site de l’Inria. Parmi elles, on note la présence d’Atos, Accenture/Octo, Sopra Steria, Bertin Technologies, Thales, etc.
Autre élément technique et non des moindres, Cédric O a refusé l’utilisation de la plateforme promue par Apple et Google. Dans la technologie de traçage des contacts, les deux acteurs américains ont mis au point un moteur (une API aujourd’hui) disponible pour les Etats qui le souhaitent. Incompatible avec le projet Français, le secrétaire d’Etat au numérique justifie son refus, « c’est une question de souveraineté sanitaire et technologique ». En conséquence, il précise que « StopCovid sera la seule application totalement intégrée dans la réponse sanitaire de l’État français. Cela ferme le débat ». A noter que ce week-end l’Allemagne a changé sa position autour de son application de « tracing contact » en adoptant l’approche décentralisée promue par Google et Apple. Pour Cédric O, il reste maintenant à continuer la discussion avec Apple et Google pour lever les limitations sur l’activation permanente du Bluetooth en arrière-plan (une des conditions techniques citée par la Cnil dans son avis).
Intégrer StopCovid dans le débat sur le déconfinement
Enfin dernier étage de la stratégie gouvernementale, l’aspect politique et plus particulièrement parlementaire. Certains élus réclamaient un débat et un vote sur l’application StopCovid. Leurs vœux vont être en parti exaucés, car le Premier ministre a annoncé ce week-end qu’un débat et un vote sur le plan de déconfinement se tiendraient mardi 28 avril à l’Assemblée Nationale et au Sénat. Or la question de l’application StopCovid sera intégrée dans le débat plus global sur le déconfinement. Un moyen pour forcer les parlementaires à voter le package complet et d’éviter un double vote.
Cette « manœuvre » parlementaire fait grincer des dents aussi bien dans l’opposition que dans les rangs de la majorité. Les premiers souhaitent un délai de réflexion avant le vote et les autres auraient préféré un double vote. Aurélien Taché, député LREM du Val d’Oise indique dans un tweet, « un vote unique sur le plan déconfinement (et donc sans possibilité de se prononcer sur le traçage numérique en tant que tel) et avec un nombre aussi réduit de députés, ne correspond pas, au regard des enjeux, à un niveau de démocratie parlementaire suffisant ». Du côté des partisans d’un vote global comme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des Lois à l'Assemblée nationale, on met en avant que « le tracking ne peut être pris en compte que dans le cadre d’une stratégie globale. Toute seule, une application n'est pas magique, miraculeuse. Il faut que ça s'insère dans un plan global ».
"L’application doit être temporaire, sur la base du volontariat, largement disponible", si c'est pas obligatoire, ok, sinon c'est mort. Pas envie d'être traquée sur mes déplacements et mes activités. (de toute façon, à la campagne, ça sert à rien :D)
Signaler un abuson a un tollé général mais tout le monde utilise waze dans sa voiture pour savoir si il y a des bouchons donc il faudrait réfléchir à mettre en place le meme type de protocole avec de l'opensource sur la map traquer la position d'une utilisateur pseudonymisé. tout est possible mais quand il y a pas de volonté, on n'avance pas et donc la France va rester coincée avec des vagues à répétitions. il y aura des répercussions sans précédent sur tout 2020 et 2021.
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