Chaque édition de Dreamforce à San Francisco, du 6 au 9 novembre cette année, arrive avec son lot d’annonces plus ou moins importantes, plus ou moins stratégiques. Noyée dans un flot de témoignages clients – Adidas et 21th Century Fox - lors de la keynote orchestrée par Marc Benioff, une annonce se distingue toutefois des autres : le partenariat stratégique avec Google. Le 6 novembre, cet accord a été présenté très rapidement par le CEO de Salesforce avec une Diane Greene, la responsable de la Cloud Platform chez Google, particulièrement peu loquace sur scène. Pourtant, après les accords avec AWS, Dell et IBM, celui avec Google apporte trois points très importants pour les clients de l’éditeur.
Premier point, les entreprises qui utilisent la plateforme CRM de Salesforce pourront utiliser gratuitement – pendant un an seulement – la suite bureautique et les services collaboratifs SaaS de Google (G Suite). Les clients conjoints des deux entreprises seront donc en mesure d'accéder de manière transparente aux informations Salesforce dans Gmail, Sheets, Calendar et autres produits. Second point, les clients conjoints pourront également relier les logiciels de vente et de marketing de Salesforce à Google Analytics 360, la version payante du service d'analyse de la firme de Mountain View. C’est la première fois que Google permet à un partenaire d’accéder aux données de navigation et de recherche collectées chez les utilisateurs de ses produits. « Les clients pourront acquérir de nouvelles informations sur les consommateurs afin de pouvoir proposer l'expérience la plus pertinente au moment opportun, que ce soit en contactant un commercial, en ouvrant un email, en visitant un site web, en cliquant sur une annonce ou en effectuant une recherche sur Google », indique un communiqué de Salesforce.
Un partenaire IaaS pour séduire la grande distribution
Troisième point de l'accord, Salesforce envisage d'utiliser l'infrastructure Google Cloud Platform comme un partenaire privilégié – un parmi d’autres selon Olivier Derrien, directeur général de Salesforce France/SVP Europe du Sud et Centrale - pour poursuivre son expansion internationale. Google, pour sa part, utilisera Salesforce comme fournisseur CRM préféré pour la vente de ses services cloud. Salesforce, qui possède déjà ses propres datacenters dans certains pays et travaille avec AWS dans d’autres, ajoute une corde à son arc IaaS pour notamment satisfaire ses clients de la grande distribution qui refusent d’utiliser les services d’Amazon, un concurrent direct dans leur cœur de métier. En France, on peut par exemple citer Auchan, qui vient d’annoncer un partenariat avec VMware et OVH pour développer ses nouvelles applications cloud, avec une volonté affichée d’aller vers le multicloud. Auchan, qui utilise également G Suite, pourrait, par exemple, s’intéresser à la solution marketing cloud de Salesforce jusqu’à présent exclusivement hébergée dans les infrastructures américaines de l’éditeur. Le partenariat IaaS noué avec Google Cloud Platform permettra ainsi aux clients sensibles à la question de la géolocalisation de conserver leurs données en Europe tout en accédant à tous les services cloud de Salesforce.
Cette association entre les deux entreprises vient bien sûr contrecarrer les ambitions de Microsoft sur le cloud avec Azure, la bureautique avec Office365 et la relation client avec Dynamics CRM. Après l’étonnante lune de miel entre Microsoft et Salesforce – avec même un projet de rachat à 55 milliards de dollars initié par Satya Nadella – la concurrence est redevenue plus intense. Les efforts en codéveloppement semblent désormais tournés vers Google même si l’intégration avec Office n’est pas remise en cause selon Dylan Steele, vice-président en charge du marketing Plateform & IoT chez Salesforce.
Pas encore d'IaaS à la carte
Pour la partie IaaS de ce partenariat, il en va de même. Salesforce ne renonce pas à ses codéveloppements avec AWS, qui assure notamment l’hébergement de la plateforme Heroku. En fonction des pays et de la présence ou pas des datacenters de Salesforce, les clients de l’éditeur auront un peu plus de choix pour stocker leurs données dans le cloud même si, comme nous l’a indiqué Olivier Derrien, il s’agit avant tout de compléter le maillage international de Salesforce. Les entreprises ne pourront pas simplement préférer un prestataire à un autre pour leurs solutions cloud. Quoiqu’il en soit, l’annonce de ce partenariat vraiment stratégique avec Google demandera un peu de temps pour se mettre en œuvre. Les premières offres couplées ne sont pas attendues avant le premier semestre 2018.
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