La rétrospective de la 5G en 2019 se lit comme un feuilleton avec des crises, des rebondissements, des inquiétudes, des retards. Le premier acte met en scène les Etats-Unis et la Chine. A la fin 2018, Donald Trump envisageait de prendre un décret pour bannir les équipements télécoms de Huawei et ZTE du sol américain en raison de soupçons d’espionnage. La menace est mise à exécution au mois de mai 2019 avec un décret interdisant aux entreprises de télécommunications américaines d'utiliser du matériel fabriqué à l'étranger qui pourrait poser des problèmes de sécurité nationale.
Pire encore, Huawei est inscrit sur l’Entity List, une liste noire des sociétés qui n’ont plus le droit de collaborer avec des firmes américaines ni avec le moindre groupe étranger utilisant des technologies américaines. Le résultat est sans appel, la firme chinoise voit les portes des entreprises américaines et étrangères se fermer. Google, à l’origine du système d’exploitation Android et des services associés utilisés dans la majorité des smartphones, et les fournisseurs de composants Intel, Qualcomm, Broadcom et Xilinx ont été les premiers à suivre les directives du gouvernement américain. Les japonais Panasonic et Toshiba ont suivi, tout comme ARM. Huawei est également mis au ban de certains organismes comme la WiFi Alliance ou la SD Association.
Face à ces attaques, Huawei se défend de tous problèmes de sécurité sur ses produits, notamment dans la 5G. Au début de l’année, le constructeur réclamait une normalisation des contrôles de sécurité sur les équipements télécoms. Par ailleurs, ayant obtenu un sursis sur l’application des sanctions américaines, Huawei s’est mobilisé pour lancer son propre OS mobile, Harmony OS et ses ventes de smartphones ne cessent de progresser pour talonner le leader Samsung.
Un effet papillon dans le monde entier
Il n’empêche la décision de Donald Trump a provoqué une déflagration dans le monde entier, mettant en porte à faux les alliés des Etats-Unis sur les déploiements de la 5G. Certains Etats ont décidé de suivre les interdictions souhaitées par la Maison Blanche comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande. Les américains sont même prêts à soutenir les concurrents de Huawei, tels que Nokia ou Ericsson pour rendre la technologie 5G abordable pour les opérateurs. Les européens sont mitigés sur la position américaine.
L’Union européenne a pointé dans un rapport les risques de cybersécurité de la 5G en visant indirectement Huawei. Les anglais, traditionnellement en phase avec les positions américaines, ont laissé la porte ouverte à Huawei sur certains aspects du réseau 5G. L’Allemagne n’a pas encore pris position, mais la Chine menace de sanctions le pays si Huawei est écarté des appels d’offres sur les réseaux 5G.
5G en France, du retard et des attentes
Dans l’Hexagone, la question de la 5G a égrené l’année 2019 avec une dramaturgie sur la procédure d’attribution des licences pour les bandes de fréquences. Plusieurs opérateurs ont déjà mené des expérimentations comme Bouygues Telecom à Lyon ou Orange à Roubaix et s’attendaient à un système d’enchères justes et équitables. Las, les opérateurs ont jugé la procédure proposée par l’Arcep comme « incompréhensible ». Finalement, le gouvernement a tranché pour un système avec des montants fixes sur des blocs de fréquences, puis des enchères sur le reste avec un prix de réserve. Les opérateurs se disent méfiants sur ce dernier point, mais s’inquiètent sur la position floue du gouvernement sur Huawei.
Le Parlement a voté une loi anti-Huawei qui oblige les opérateurs à obtenir une autorisation de l’Anssi pour être en mesure d’utiliser les antennes 5G des fournisseurs avec lesquels ils souhaitent travailler. La fédération française des télécoms (FFT) a demandé des éclaircissements au gouvernement pour avoir une position claire sur l’usage ou non des équipements Huawei dans leurs réseaux. Sinon, le déploiement prendra du retard et surtout les coûts vont augmenter, avertissent-ils. Le feuilleton est donc loin d’être terminé.
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