Quelques semaines après l’annonce du partenariat stratégique dans les infrastructures pour datacenter entre Lenovo et NetApp à New York, nous avons rencontré à Paris le vice-président exécutif des opérations mondiales client de NetApp, Henri Richard, à l’origine de l’accord, pour revenir sur la stratégie et les perspectives de NetApp. Cette alliance entre le fournisseur chinois et le spécialiste californien les placent tous deux dans une position beaucoup plus forte sur le marché des infrastructures datacenters face à leurs concurrents Dell EMC et HPE. Comme l’a indiqué Ashish Nadkarni, analyste chez IDC, à notre confrère Marc Ferranti d’IDG NS, Lenovo est le dernier des grands fournisseurs de matériel sans beaucoup de stockage externe. « Ils se retrouvent dans la même position que Dell ou HP il y a quelques années, et c'est leur volonté de changer cette équation afin qu'ils puissent égaliser le terrain de jeu avec leurs concurrents ».
Pour NetApp, l’enjeu est de consolider sa position sur le marché du stockage flash et hybride, nous a expliqué Henri Richard, en développant l’activité du fournisseur de solutions de stockage sur le marché chinois. Le joint-venture entre Lenovo et NetApp, qui sera mise en place début 2019, est justement censé ouvrir les portes de l’Empire du milieu. Interrogé sur les mésaventures de certains fournisseurs américains en Chine, Symantec par exemple avec le joint-venture dans la sécurité et le stockage noué avec Huawei, Henri Richard s’est montré très confiant en rappelons que le deal de Symantec était local alors que l’accord avec Lenovo est lui global. « NetApp devient le fournisseur exclusif de Lenovo dans le domaine du stockage avec des produits OEM identiques. Il n’y pas de customisation de nos solutions ».
Un segmentation du marché
Le partage du marché entre NetApp et Lenovo nécessitera toutefois un arbitrage et trois niveaux ont été envisagés par les deux partenaires. « Nous attendons un développement très fort de cette offre, mais chez les clients où nous nous aurons l’impression d’être très faibles, nous n’irons pas. Là où nous sommes très forts [les grands comptes], il y aura un processus de registration et Lenovo nous soumettra une registration. Pour les PME-PMI [le point fort de Lenovo], nous sommes absents de certains pays où Lenovo est présent, nous irons donc ensemble sur certains projets avec une bonne synergie. Au final, il y aura peu de frictions et en cas de tensions entre les équipes, nous gérerons la friction. Cela vaut la peine de faire cet effort », poursuit Henri Richard. Pour développer son activité, NetApp s’est organisée en métiers avec des comptes globaux : banque, industrie, distribution… L’idée est aujourd’hui de travailler avec Lenovo avec une phase initiale de codéveloppement avec des ingénieurs des deux cotés en avant-vente. Le support niveau 1 et 2 sera assuré par les deux entreprises et le niveau 3 fera appel aux ressources de NetApp si besoin.
Interrogé sur un éventuel rachat de NetApp par Lenovo, Henri Richard a vite écarté cette hypothèse. Avec une valorisation de 21 milliards environ, plus un abondement de 30% pour les actionnaires, le ticket d’entrée est en effet très élevé. Questionné sur ce même point en septembre dernier à New-York lors de l’événement Transform 2.0, le CEO de Lenovo Yang Yuanquing nous avait répondu que toutes les options avaient été envisagées, mais qu’il désirait aller vite et qu’un partenariat lui avait semblé la meilleure option. Une acquisition aurait été plus lente à réaliser si on prend en compte les contraintes législatives aux États-Unis et en Europe et comme nous l’a confirmé Henri Richard, NetApp n’est pas à vendre.
Objectif ambitieux pour la France
Un mot sur la France pour conclure. Avec un dirigeant comme Henri Richard à Sunnyvale, la filiale hexagonale est bien sûr scrutée de très près. Elle est aujourd'hui numéro 1 sur le marché de la flash et numéro 2 en absolu sur celui du stockage, nous a indiqué le dirigeant qui se félicite de travailler avec une très forte équipe française : « La stratégie fonctionne et la croissance du cloud est très forte. L’objectif est toujours de passer numéro 1 devant Dell EMC comme en Allemagne ». La filiale française qui a démarré deux ans après l’Allemagne en 1996 paie encore aujourd’hui ce petit retard à l’allumage alors que les équipes locales ne déméritent pas.
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