C'est un de ces projets réussis que les prestataires IT ont pris l'habitude de mettre en valeur sur leur site. Sauf que ce projet s'est déroulé dans des circonstances tragiques, celles de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Sur son site, McKinsey revient sur la migration vers le cloud de la Raiffeisen Bank Ukraine, une filiale de la banque autrichienne du même nom et un des principaux établissements du pays, avec 6 000 employés (dont 800 à l'IT). Une banque qui, lors du déclenchement des hostilités, n'a eu d'autre choix que de mettre sur pied, dans l'urgence, une migration vers le cloud public pour assurer la continuité de ses opérations. Comme le raconte son CTO, Hryhorii Tatsyi : « Nous avons effectué cette migration en trois mois, car nous n'avions pas le choix. Nous avons tous travaillé sept jours sur sept, 12 heures par jour ou plus, pour migrer plus de 1 000 serveurs au cours des trois premiers mois. Nous n'avons connu aucune interruption de service, nous n'avons dépensé aucun dollar pour une assistance supplémentaire de la part des fournisseurs et nous avons tout fait fonctionner avec nos mains, notre tête et notre coeur. Mais nous étions super-motivés. Plus de trois millions de clients dépendent de nous, et si nous échouions, l'Ukraine échouait, car les gens auraient perdu confiance dans le système bancaire ».
Lors du déclenchement de la guerre par la Russie, les datacenters où étaient alors hébergés l'essentiel des systèmes de Raiffeisen Bank Ukraine étaient sous la menace d'une invasion ou d'un bombardement russe. « Cela a été la décision la plus facile de ma vie. Lorsque je me suis réveillé à 5 heures du matin le 24 février 2022 (le jour où la Russie a envahi l'Ukraine, NDLR), j'ai décidé que nous allions commencer à migrer vers le cloud immédiatement. J'ai appelé mon patron et j'ai dit : "allons-y." ». Le CTO peut alors s'appuyer sur les scénarios préparés par le responsable de la continuité de la banque, ainsi que sur un plan de transformation mené au préalable (avec la séparation du SI en dix différents domaines), un plan qui s'il ne prévoyait pas une migration immédiate vers le cloud, se projetait à terme vers ce type d'architectures. Tant et si bien que le legacy - 80 % de la migration étant basée sur du lift & shift, le reste du SI bénéficiant de travaux de modernisation - peut aujourd'hui bénéficier de certains services cloud, comme les bases de données managées que proposent les hyperscalers.
Opération critique menée par une équipe à distance
Si ces fondations se sont évidemment révélées utiles à la banque ukrainienne, elles ne résolvaient pas tout. Loin s'en faut. « Nous n'avions qu'un plan général qui disait : "Nous allons faire ça, et ça, et ça." Mais nous ne savions pas comment le faire, explique le CTO. Ainsi, toutes les décisions sur la manière de réaliser la migration ont été prises pendant la migration elle-même. Cela a fonctionné parce que nous avions déjà de l'expérience sur différentes plates-formes de cloud ; la plupart des membres de mon équipe avaient travaillé sur ces environnements à différents postes au sein de différentes entreprises ». Une équipe qui a travaillé sur cette opération critique à distance, certains depuis des villes ukrainiennes, d'autres depuis des pays tiers comme l'Autriche ou la Serbie. « Certaines personnes travaillaient déjà à distance, mais environ 50 % de notre personnel travaillait sur site, dans nos bureaux. A cause de la guerre, ces employés ont émigré vers des endroits plus sûrs, à l'intérieur et à l'extérieur de l'Ukraine », reprend Hryhorii Tatsyi.
Dans son interview publiée sur le site de McKinsey, le CTO revient encore sur la maîtrise de ses dépenses, qu'il est parvenu à installer après sa migration en urgence : « Immédiatement après la migration, notre facture s'élevait à 700 000 dollars par mois, car nous payions pour des capacités dont nous n'avions pas besoin. Mais en l'espace de deux mois, nos factures ont considérablement diminué, pour redescendre sous la barre des 350 000 dollars par mois, grâce à la création d'une communauté FinOps interne. » Une communauté animée par Hryhorii Tatsyi et créée dès la séparation du SI en dix domaines différents, chacun comptant un expert FinOps. « Nous échangeons sur les sujets de maîtrise des coûts toutes les deux semaines, comme si nous étions en concurrence les uns avec les autres », raconte Hryhorii Tatsyi.
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