Présenté il y a cinq ans lors du Mobile World Congress à Barcelone, la deuxième génération du casque de réalité augmentée Hololens de Microsoft voit sa production cesser. À l'époque, les analystes avaient prédit que cet équipement stimulerait l'essor de la technologie AR, qui n'avait jusqu'alors pas réussi à s'imposer sérieusement. Mais pour l'essentiel, cette anticipation ne s'est pas concrétisée. Un porte-parole de Microsoft a indiqué que l'entreprise avait également « proposé une date butoir d'achat d'unités pour les clients et les partenaires », en précisant que « le support de l'HoloLens 2, y compris les mises à jour de sécurité, prendra fin le 31 décembre 2027. » Il a également ajouté que Microsoft « continuera à investir dans les opportunités de réalité mixte avec des solutions logicielles et des services, en partenariat avec l'écosystème des acteurs de la téléphonie mobile et du matériel de réalité mixte ».

Dans ce même communiqué, le porte-parole indique aussi que la société restera « pleinement engagée dans le programme IVAS avec le ministère américain de la Défense. » Il y a trois ans, au moment du lancement de ce programme, l'entreprise avait indiqué dans un blog que « l'armée américaine travaillerait avec Microsoft sur la phase de production du programme Integrated Visual Augmentation System (IVAS), qui passe du prototypage rapide à la production et à la mise en service rapide ». Le casque IVAS a été conçu pour répondre aux besoins de l'armée. Basé sur HoloLens et augmenté par les services cloud Microsoft Azure, « l'IVAS offre une plateforme qui permettra aux soldats d'être plus en sécurité et plus efficaces. »

Le début de la fin

Au début de l'année dernière, Microsoft, confrontée à des incertitudes macroéconomiques et à un ralentissement de sa croissance, a confirmé le licenciement de 100 personnes travaillant sur ses produits HoloLens, les laptop Surface et Xbox, ce qui a entraîné la fermeture de la division. Selon Anshel Sag, analyste principal chez Moor Insights & Strategy, la décision de cesser la production des HoloLens ne fait que « entériner ce à quoi s'attendait une majeure partie de l'industrie depuis un certain temps déjà ». Après les importants licenciements dans la division Mixed Reality et l'abandon du framework MRTK (Mixed Reality Toolkit) qui alimentait une grande partie du logiciel HoloLens, il devenait clair, selon l'analyste, que « Microsoft n'investissait plus dans la réalité augmentée du point de vue du matériel et que l'entreprise voulait seulement se limiter à un rôle de fournisseur de logiciels, comme partenaire de lancement du Vision Pro d'Apple, en proposant aussi des outils de productivité et de jeu pour Meta Quest ».

Qui pour prendre le relais ?

Selon l'analyste, « grâce à son approche OpenXR et à l'adoption de logiciels open source, la stratégie de Microsoft est depuis longtemps agnostique sur le plan du matériel, de sorte que de nombreux partenaires de l'éditeur pourraient porter une partie de leur travail sur d'autres plates-formes AR d'entreprise ». Sauf que, selon lui, à part l'Argo de Digilens, il y a peu de plateformes de réalité augmentée autonomes qui pourraient prendre la suite du HoloLens 2. Digilens est « à la fois un fournisseur d'optiques et fabricant de casques, et il semble s'être récemment beaucoup développé avec de nombreux anciens partenaires de Microsoft, si bien, qu'à mon avis, il est le mieux placé du point de vue du matériel et du logiciel pour aider les anciens clients du HoloLens 2 ».

De plus, cette année, lors de l'Augmented World Expo AWS 2024, Digilens a été le premier à démontrer que Gemini de Google fonctionnait sur n'importe quel casque de réalité augmentée. « Même s'il existe d'autres entreprises comme RealWear et ThirdEye, ces plateformes sont moins puissantes et peuvent offrir une expérience différente de celle à laquelle s'attendent les porteurs d'HoloLens ». La réalité assistée de RealWear utilise un écran LCD monoculaire, et ThirdEye exploite des optiques avec une réalité augmentée transparente, mais la plateforme ne dispose que d'un chipset XR1 qui aura probablement besoin d'un rendu à distance pour améliorer les graphismes.

Un cas d'usage très prometteur

Scott Bickley, responsable de la recherche chez Info-Tech Research Group, regrette fortement la décision de Microsoft, car « l'usage de la réalité augmentée dans l'espace industriel était vraiment prometteur ». Selon lui, « cela pourrait être une bénédiction déguisée si les alternatives peuvent répondre à ce besoin et émerger de l'espace des médias sociaux à un prix plus réaliste, comme la série de produits Quest de Meta, dont le prix est de quelques centaines de dollars contre 3 500 dollars pour HoloLens ».

À ce jour, a déclaré M. Bickley, l'adoption des HoloLens est pathétique, avec peut-être quelques centaines de milliers d'unités vendues pour toutes les générations du produit. « Si l'on compare ce chiffre à un investissement de plusieurs centaines de millions de dollars, voire d'un milliard, le retour sur investissement ne s'est jamais concrétisé ». «  Le besoin de solutions basées sur la réalité augmentée dans le domaine de la fabrication et de l'industrie est une réelle lacune », a-t-il déclaré, « cependant, ce cas d'utilisation n'a pas suffi à justifier la poursuite des investissements de R&D de Microsoft ».