Des droits de douane à l'aide à l'Ukraine en passant par la neutralité du net, les revirements des Etats-Unis sous l'ère de la présidence de Donald Trump se multiplient depuis fin janvier. Le dernier en date émane du Pentagone avec la décision, selon de nombreux confrères américains dont The Record, Le New York Times et le Washington Post, du secrétaire à la Défense des Etats-Unis Pete Hegseth d'arrêter les cyberattaques visant la Russie. "M. Hegseth a donné l'instruction au chef du Cyber Command, le général Timothy Haugh, qui a ensuite informé le directeur sortant des opérations de l'organisation, le général de division du corps des Marines Ryan Heritage, des nouvelles directives, selon des personnes qui ont parlé sous couvert de l'anonymat en raison du caractère sensible de l'affaire", explique The Record. Interrogé par NBC News, un porte-parole de la défense américaine a refusé de commenter cette décision en raison de préoccupations de sécurité opérationnelle, et simplement indiqué que "pour le secrétaire d'État M. Hegseth, la sécurité des combattants dans toutes les opérations, y compris dans le domaine cyber, est une priorité absolue."
Selon The Record, "L'ordonnance ne s'applique pas à l'agence américaine de cybersécurité [CISA], que M. Haugh dirige également, ni à ses activités de renseignements ciblant la Russie, ont précisé les sources." Dépendant du ministère de la sécurité intérieure, cette agence a déclaré que sa mission est de se défendre contre toutes les cybermenaces qui pèsent sur les infrastructures essentielles des États-Unis, y compris celles provenant de la Russie, et qu'il n'y a eu aucun changement dans sa position.
Des craintes de cyberattaques russes armées à l'IA
Jusqu'à présent, les Etats-Unis menaient sur le front cyber des actions à la fois défensives et offensives à l'encontre de la Russie. Mais il semblerait bien que le réchauffement des relations entre Donald Trump et Vladimir Poutine concourt à une évolution notable de doctrine. "La durée exacte de l'ordre de M. Hegseth n'est pas connue, mais le commandement a été informé que les directives resteraient en vigueur jusque dans un avenir proche", d'après certaines sources. L'arrêt des activités de cyberdéfense américaines à l'encontre de la Russie intervient alors que ce pays intensifie depuis plusieurs mois ses attaques informatiques contre des infrastructures stratégiques et sensibles en Ukraine mais aussi dans d'autres pays de l'OTAN. "À l'époque, l'accent était mis sur l'Ukraine", expliquait en septembre dernier Keir Giles, expert en campagnes de cybersécurité russes au sein du groupe de réflexion anglais Chatham House. "Ce qui est particulièrement frappant en ce moment dans les activités de cyberdéfense de la Russie, c'est qu'elles ressemblent à la préparation d'une attaque ouverte contre l'OTAN, en particulier avec la reconnaissance et la préparation du sabotage des liaisons logistiques, des réseaux ferroviaires, etc. à travers l'Europe." En novembre dernier, le chancelier du Duché de Lancaster Pat MFadden, pointait un risque accru de l'usage de l'IA dans des cyberattaques émanant de Russie visant des infrastructures critiques en particulier les centrales électriques.
Ce relâchement de la pression américaine sur le front des cyberattaques menées contre la Russie a fait réagir Chuck Schumer, chef de file de la minorité démocrate au Sénat : "Donald Trump est si désespéré de gagner l'affection d'un voyou comme Vladimir Poutine qu'il semble lui donner un laissez-passer alors que la Russie continue de lancer des cyber-opérations et des attaques par ransomware contre des infrastructures américaines essentielles, menaçant ainsi notre sécurité économique et nationale", a déclaré M. Schumer. "Donald Trump commet une grave erreur stratégique en se désarmant unilatéralement face à Poutine. La meilleure défense est toujours une bonne attaque, et cela vaut aussi pour la cybersécurité." L'année dernière, l'administration Biden qualifiait la Russie de "cybermenace mondiale durable", soulignant que le service de renseignement extérieur russe avait pris pour cible des agences gouvernementales, des groupes de réflexion, des secteurs de l'énergie et de l'aviation aux États-Unis.
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