Le DOJ, ministère de la Justice américain, a fait appel de la décision d’un tribunal de New York qui a rejeté sa requête demandant qu’Apple l'aide à extraire des données d’un iPhone 5c utilisé par un trafiquant de drogue présumé. Cette affaire s’apparente à celle qui oppose Apple au FBI devant un tribunal de Californie, dans laquelle le fabricant de l’iPhone conteste une décision qui l’obligerait à assister le bureau fédéral d’enquête dans le cadre de l’attentat terroriste de San Bernardino. Une juge californienne lui a demandé de développer un logiciel qui pourrait aider le FBI à contourner le mot de passe de l'iPhone 5c sous iOS 9 utilisé par l'un des terroristes. Apple refuse de le faire et s'est vu soutenu, non seulement de grands noms de l'industrie high-tech comme Microsoft, Google, Facebook, Amazon ou Yahoo, mais aussi du Haut commissaire aux droits de l'Homme de l'ONU.
A New York comme en Californie, les enquêteurs ne peuvent pas déverrouiller le téléphone en utilisant des méthodes par force brute, consistant à tester toutes les combinaisons de mots de passe possibles, parce que le contenu de l’iPhone est peut-être protégé par une fonction d’auto-effacement qui serait activée après plusieurs essais infructueux. Le problème rencontré par les enquêteurs, c’est qu’il est impossible de savoir si la fonction d’auto-effacement du contenu de l'iPhone a été activée. Apple pourrait aider à extraire les données de l’iPhone 5s, comme il l’a fait des dizaines de fois précédemment sur des versions similaires du terminal mobile, à la demande de l’administration, avance le DOJ. Dans son appel (cité par la chaîne NBC), il rappelle que pour les versions de l’OS antérieures à iOS 8, Apple peut contourner la fonctionnalité mot de passe et accéder au contenu du téléphone qui a été chiffré. Mais la firme de Cupertino invoque la vie privée et la sécurité des utilisateurs pour ne pas le faire. Le fait d’avoir consenti à le faire précédemment à la suite de décisions de justice similaires, ne signifiait pas qu’elle consentait à ce procédé, indique-t-elle.
Le DOJ décrit une volte-face de la part d'Apple
Pour le ministère de la Justice, qui dispose d’un mandat, il s’agit d’une volte-face de la part d’Apple dans ce cas précis. Le fabricant de l’iPhone avait d’abord accepté d’extraire les données lorsqu’il a répondu que « dès réception d’un mandat de perquisition conforme aux instructions [du processus légal], nous pourrons fixer la date d’extraction dans un délai d’une à deux semaines ». Selon le document déposé lundi par le DOJ, à aucun moment, pendant les communications qui ont eu lieu avant que l’administration ne demande qu’une décision soit rendue, Apple n’a fait objection à la demande visant à le voir apporter son aide.
Le juge de la Cour du District Est de New York, James Orenstein, a estimé le 29 février dernier qu’Apple ne pouvait pas être contraint à extraire les données du téléphone. Dans la décision qu’il a rendue, le magistrat estime que la lecture que l’administration fait du All Writs Act (datant de 1789), couramment invoqué pour recourir à l’assistance des entreprises high tech dans des cas similaires, conduirait à modifier l’objectif de la loi. Son statut visant à combler certaines lacunes de façon limitée pour assurer un bon fonctionnement du système judiciaire se verrait alors transformé en un mécanisme de retournement de la séparation des pouvoirs qui déléguerait au pouvoir judiciaire un pouvoir législatif uniquement limité par la capacité supérieure du Congrès à interdire ou à préempter.
Apple soutenu par la IT et l'ONU dans l'affaire de San Bernardino
Mais de son côté, l’administration considère que le pouvoir résiduel de la Cour par rapport à la loi All Writs Act est particulièrement important dans un cas où la législation a pris du retard sur la technologie et les risques d’obsolescence. Et elle pointe le fait que les tribunaux se sont appuyés sur cette loi pour requérir l’assistance de tiers avec mandats de perquisition dans des circonstances impliquant une intervention bien plus lourde que dans l’affaire examinée en ce moment à New York. Le DOJ demande donc à la Cour de revoir la décision du juge Orenstein.
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