« Ce dimanche 20 mars 2016, une personne de tierces parties a présenté au FBI une solution pour parvenir à déverrouiller l'iPhone de Syed Farook », ont déclaré les avocats représentants le gouvernement dans un document déposé au tribunal hier après-midi. « Des tests seront nécessaires pour voir si cette méthode est viable et vérifier qu’elle ne compromet pas les données stockées sur l'iPhone de Syed Farook. Si cette solution s’avère viable, l'assistance d'Apple requise par l’ordonnance All Writs Act Order, n’est plus nécessaire », ont encore écrit ces mêmes avocats. Le document déposé hier n’explique pas la méthode proposée, mais il précise que diverses parties extérieures ont suggéré au gouvernement des solutions pour casser la protection de l’iPhone 5c.
C’est un peu un coup de théâtre dans cette affaire très médiatisée qui oppose Apple au Ministère américain de la Justice. Elle a mis en évidence le conflit qui peut exister entre la nécessité de protéger les données personnelles des utilisateurs par un cryptage fort et les besoins des autorités judiciaires pour mener leurs enquêtes criminelles. Au départ, le FBI avait demandé l’aide d'Apple pour casser le cryptage de l’iPhone 5c appartenant à Syed Farook. L’agence gouvernementale avait fait valoir que le mobile du tueur pouvait contenir des indices permettant de déterminer si Syed Farook et sa femme avaient organisé seuls la fusillade de San Bernardino de décembre dernier. Le gouvernement avait déclaré après l’attaque que le couple était soupçonné d’avoir des sympathies avec des groupes terroristes.
Une bataille judiciaire évitée ?
En réponse, Apple avait déclaré que, pour accéder au terminal, le constructeur devait créer une version spéciale du logiciel iOS qui affaiblirait la sécurité de tous ses utilisateurs. La firme de Cupertino craignait également que l’ordonnance du tribunal crée un précédent juridique qui obligerait, à l'avenir, Apple et d'autres entreprises à livrer au gouvernement un accès à des données personnelles cryptées. Mais, si le gouvernement a effectivement trouvé sa propre solution pour accéder aux données cryptées, il pourra faire l’économie d’une bataille judiciaire, ce qui signifie, au minimum, que l’affaire en cours ne pourra pas constituer de précédent.
En février dernier, Apple avait déclaré qu'il s’opposerait à l’ordonnance du juge américain lui imposant d’aider le FBI. Une audience à laquelle devaient participer les avocats d’Apple et les avocats du gouvernement était prévue ce mardi après-midi à Los Angeles. Mais elle a été reportée sine die. Cependant, l’affaire se poursuit, même si elle reste suspendue à la faisabilité des techniques de décryptage suggérées au gouvernement. Dans le document déposé lundi au tribunal, le FBI déclare que, même s’il a réclamé l’aide d’Apple, il a continué à chercher de son côté une solution pour accéder à l'appareil du tueur. Mais, il ne donne aucun détail sur la méthode qu'il compte utiliser.
Un point sur la situation le 5 avril
Selon certains chercheurs, un clonage de la mémoire du mobile pourrait peut-être faciliter l’accès aux données. La clé de protection, que le gouvernement cherche à obtenir, verrouille de façon permanente le téléphone après 10 tentatives infructueuses d’identification. Mais un clonage permettrait de faire plusieurs copies de la mémoire du mobile et de tester sans limites des séries de mots de passe.
La méthode a fait l’objet d’une discussion lors d'une audience de la commission judiciaire de la Chambre plus tôt ce mois-ci. Mais personne n'a pu démontrer publiquement qu’elle donnerait un résultat. On ne sait pas si c’est la solution que le gouvernement envisage d'utiliser aujourd’hui, et il a peut-être trouvé d’autres options techniques. Quelle que soit la méthode, le gouvernement a précisé qu’il pourrait faire un point sur la situation le 5 avril. On devrait donc savoir à cette date si ses efforts ont été payants.
Lors d’un briefing avec les journalistes, les avocats d’Apple ont déclaré qu'ils n’avaient aucune idée de la méthode que le gouvernement envisageait d'utiliser, et ils savent encore moins si elle peut fonctionner. Mais si le gouvernement a trouvé une vulnérabilité inconnue dans iOS, Apple voudra certainement savoir où elle se situe. Dans l’immédiat, le document déposé par le gouvernement suspend l'ordonnance intimant Apple d’aider le FBI. Si le gouvernement réussit à accéder au contenu du téléphone, l’affaire impliquant le mobile de Syed Farook devient sans objet. Mais les avocats d'Apple ont déclaré que la position de l'entreprise n'a pas changé : si le gouvernement estime qu'il a encore besoin de l'aide d'Apple pour contourner la sécurité de l'iPhone, Apple continuera à s’y opposer.
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