La mésaventure qui arrive au fournisseur de datacenters Interxion pourrait-elle arriver à d’autres opérateurs de sites ? Le tribunal administratif de Montreuil a annulé un arrêté préfectoral qui l'autorisait à exploiter son datacenter situé à La Courneuve, selon nos confrères de Mediapart. Il vient de rendre sa décision après l'audience qui s’est tenue le 1er octobre dernier, à la suite de la plainte d'un collectif de riverains du datacenter, rassemblé dans l’association Urbaxion’93. Contacté par la rédaction, la société Interxion n'a pas souhaité commenter cette décision. Elle a ouvert son datacenter Par7 en juin 2012 sur une surface de 4 500 m2 d’espace équipé avec une puissance électrique affichée de 64 MW.

Les plaignants ont demandé l’annulation de l’autorisation permettant à Interxion d’exploiter son datacenter situé rue Rateau, en faisant état d’une irrégularité de l’enquête publique et d’insuffisances dans l’étude d’impact, selon le site reporterre.net. Ces riverains se plaignent du bruit généré par l’installation qui refroidit les centaines de serveurs informatiques abrités par l’immense hangar d’Interxion. A cela s’ajoutent les risques liés au stockage de plusieurs centaines de milliers de litres de fuel conservés pour alimenter les groupes électrogènes diesel du site.

Des habitations situées à quelques mètres du datacenter

Avec le développement accéléré de l’usage d’Internet, des communications mobiles, de la vidéo à la demande de type Netflix et des applications cloud dans les entreprises, le déploiement de datacenters pour traiter ces milliards d’interactions informatiques est passé à la vitesse supérieure. Un certain nombre d’entre eux se sont installés depuis plusieurs années en Ile-de-France, notamment en Seine-Saint-Denis (à Pantin, Aubervilliers, La Courneuve…) ou dans les Hauts-de-Seine (à Clichy notamment) et ils continuent à se développer.

Or, si ces implantations, qui consomment énormément d’énergie et génèrent des nuisances sonores pour refroidir les armoires informatiques, sont souvent situées dans des zones industrielles relativement éloignées des quartiers d’habitation, ce n’est pas toujours le cas. A La Courneuve, rue Rateau, le fonctionnement du datacenter d’Interxion est loin d’être passé inaperçu. Les logements des premiers riverains sont situés à quelques mètres du datacenter qui se trouve tout simplement de l’autre côté de la rue. Cette décision du tribunal administratif de Montreuil va-t-elle inspirer d'autres Franciliens ayant à subir dans d’autres villes de semblables désagréments ? (mise à jour : en attendant, Interxion va devoir régulariser sa situation et, très probablement, devoir déposer une nouvelle demande d’autorisation conforme au jugement rendu avec une nouvelle enquête publique. Voir à ce sujet notre article : Interxion devra réduire les nuisances de son datacenter francilien)

Les datacenters, nouveaux pollueurs

De façon générale et en dehors des nuisances directes de voisinage, les impacts environnementaux des datacenters sont en passe de devenir un problème majeur. Au regard de leurs besoins considérables en dépense énergétique, ces centres de calcul deviennent des pollueurs notoires. Aux Etats-Unis, ils ont consommé en 2013 près de 91 milliards de kilowatts-heure et ils devraient en consommer 139 milliards en 2020, soit une augmentation de 53% selon une étude publiée l’an dernier par la National Resources Defense Council.

En juin dernier, en France, sur le forum Teratec 2015 consacré au calcul haute performance, Thierry Breton, président d’Atos, avait également insisté sur l’importance des problématiques énergétiques des datacenters, bien connues et de longue date. « Ce sont des sujets à ne pas prendre à la légère », avait-il rappelé.