Ne plus subir les diktats de Microsoft. C'est ce qui a poussé la région Occitanie, qui regroupe 13 départements et plus de 6 millions d'habitants, à chercher une alternative à la suite collaborative du premier éditeur mondial. Alors qu'elle s'était équipée d'Office 365 durant la crise du Covid, la région se trouve confrontée trois ans après, lors du renouvellement du contrat, à des conditions commerciales qui la poussent à étudier des solutions de rechange. « Nous faisions face à une hausse des coûts de 20 à 30%, alors que nos budgets de fonctionnement sont, eux, en train de se contracter. Par ailleurs, nous voulions revenir à un numérique plus souverain ; avec Microsoft, nous avions l'impression de ne plus décider de notre avenir », indique Nelly Mallet, la directrice adjointe services utilisateurs au sein de la direction de l'information et du numérique de la collectivité. « Par exemple, Microsoft ne nous demandait pas notre avis sur l'arrivée de l'IA dans la solution. De son point de vue, la technologie faisait partie du package », souligne Nejla Yucel, cheffe de projet transition numérique à la région Occitanie.
Visio : Zoom, de façon temporaire
Face à ces constats, la collectivité regroupant les anciennes régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées décide de restreindre le périmètre couvert par les produits Microsoft, en achetant des licences Office 2021. « Ainsi, nous n'avons plus de lien avec le cloud de l'éditeur », indique Nelly Mallet. La région se lance dans la recherche d'une solution collaborative de rechange couvrant les exigences de la collectivité en matière d'ergonomie, de souveraineté et de sécurité. Trois solutions sont testées (Interstis, Wimi et eXo) par la DSI, mais aussi par les utilisateurs. Ce sont précisément ces derniers qui appuient le choix d'eXo, en raison de son ergonomie.
La solution, déployée en mode SaaS dans un environnement SecNumCloud est aujourd'hui exploitée pour l'animation d'équipes ou la collaboration sur des documents. « Nous n'avons pas déployé la visio de la plateforme, du fait de notre niveau d'exigence, la région comptant 2500 utilisateurs potentiels répartis entre Toulouse et Montpellier », indique Nelly Mallet. Pour cette fonction, la région Occitanie exploite, « de façon temporaire », Zoom et lorgne vers BigBlueButton, une solution Open Source pensée au départ pour le monde de l'éducation et appuyée par la Dinum, la DSI de l'État. « Nous étudions les usages possibles de cet outil et discutons de l'intégration de ce composant dans la plateforme eXo », précise la responsable. Y compris pour couvrir une partie des besoins, en tout cas dans un premier temps.
Une facture divisée par quatre
Des interactions avec l'éditeur et une capacité à influer sur sa roadmap qu'apprécie la collectivité. « Grâce à ces discussions, nous avons déjà mis en place des dizaines d'évolutions, comme la multisélection de documents, la mémorisation de vues préférentielles ou la publication de liens de téléchargement. Par rapport à nos besoins, la migration vers eXo ne se traduit pas par un recul en termes de fonctionnalités », assure Nejla Yucel. Selon celle-ci, la plateforme accueille aujourd'hui plus d'utilisateurs qu'auparavant Microsoft Teams. « Pas parce c'est plus pratique, mais parce que nous avons mis l'accent sur l'accompagnement au changement. » Avec des formations, des webinaires, des rendez-vous hebdomadaires, des tutoriels ou un accompagnement des réunions de direction. « Avec ce dispositif, nous avons touché environ 50% des agents », indique la cheffe de projet.
De gauche à droite, Nejla Yucel, cheffe de projet transition numérique à la région Occitanie, et Nelly Mallet, directrice adjointe services utilisateurs au sein de la Direction de l'information et du numérique de la collectivité. (Photo : D.R.)
Un effort que la région a pu financer avec les économies réalisées sur le budget Microsoft, la solution Office 365 représentant un coût annuel de 1,2 M€ (avant augmentation). « En migrant sur eXo, dès la première année, nous avons divisé cette facture par quatre », résume Nelly Mallet. Aujourd'hui, la solution compte environ 1 000 utilisateurs actifs, auxquels s'ajoutent des externes (centres de formation, entreprises...). Et le contrat permet de porter ce total jusqu'à 8 000 utilisateurs en simultané (dont 4 000 en interne). « Le tout avec une gestion des droits très simple », indique la directrice adjointe services utilisateurs au sein de la DSI.
Réduire les licences les plus chères au strict nécessaire
Pour cette dernière, le projet n'est qu'une première étape dans une stratégie de sortie des Gafam. En ligne de mire, d'ores et déjà, la messagerie Exchange du même Microsoft. Un premier prototype a été défini avec BlueMind et un autre doit suivre avec Zimbra. Les quelques difficultés rencontrées se concentrant sur les utilisateurs gérant plusieurs calendriers ou boîtes aux lettres.
Portée par un élu (Marc Sztulman) et par le directeur général des services de la collectivité, cette stratégie vise tant à revenir à des composants souverains qu'à réaliser des économies. La région entend ainsi continuer à réduire ses licences Microsoft ou Adobe - en concentrant les licences sur les utilisateurs ayant des besoins avancés pour proposer des alternatives moins onéreuses aux autres. « Cette sortie par paliers des Gafam s'accompagne d'une volonté de valider chaque étape avec les utilisateurs, souligne Nelly Mallet. Concernant la collaboration, quelques-uns regrettent certes la disparition de Teams, mais la majorité des agents a compris le sens de cette politique et manifeste une certaine fierté de s'affranchir des Gafam. »
En plus de cette limitation des licences les plus lourdes pour le budget de la région, la DSI de la collectivité s'attache aussi à développer les usages et l'ergonomie des alternatives qu'elle met en place. Comme avec eXo, où des intranets par direction sont à l'étude afin que la solution s'installe comme l'outil par défaut. Sans oublier les travaux portant sur l'intégration de la plateforme collaborative, notamment avec la messagerie. « Une des limites actuelles réside dans la gestion des notifications. Mais, nous travaillons avec l'éditeur à des évolutions sur ce terrain », glisse Nelly Mallet.
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