Catherine Lejealle est professeur associé à l'ESG Management School. Ingénieur télécom et docteur en sociologie, elle a réalisé une étude sur l'usage du très haut débit par le grand public dans le cadre de la stratégie FTTH. Une tribune résume les résultats de cette étude. La justification économique du déploiement de la fibre optique par des opérateurs télécoms reste à apporter.
« Il y a un vrai intérêt pour le FTTH de la part des usagers parce que la fibre apporte un vrai confort dans l'usage des services actuels, notamment en permettant une simultanéité d'usages par différents membres du foyer (film en streaming, jeu en ligne, etc.) » observe Catherine Lejealle. Mais elle apporte tout de suite un bémol à un constat a priori réjouissant : « cet intérêt ne se manifeste que parce que les abonnements sont actuellement au même prix ».
Pas de rupture entre ADSL et FTTH
En effet, les utilisateurs sont prêts à payer pour des services (comme un bouquet de chaînes de télévision) mais pas pour une infrastructure ressentie en elle-même comme sans vraie utilité faute d'une vraie rupture avec l'ADSL. L'arrivée de l'ADSL a amené une rupture réelle par rapport au RTC, non seulement en termes de débits mais aussi par l'apparition de la connexion permanente. Il n'y a pas de rupture équivalente entre l'ADSL et le FTTH. Les deux technologies sont plus vues comme une continuité sur le plan des usages. Sur le plan technique, la rupture est pourtant plutôt entre ADSL et FTTH puisque l'infrastructure changeait.
« La prochaine rupture sera amenée par les usages innovants car le public attend d'être bousculé sans rien voir venir » souligne la sociologue. Et il existe une marge budgétaire pour payer ces nouveaux services : cette marge est issue de la baisse des coûts de téléphonie mobile.
Un modèle économique douteux
Du coup, les investissements dans la fibre optique manquent d'une justification économique. Côté opérateurs, il est nécessaire, pour déployer le FTTH, de refaire du génie civil, de poser la fibre, etc. Cela implique de très gros investissements avant même de pouvoir commencer à démarcher son premier client. L'ADSL, au contraire repose sur la boucle locale cuivre, et est donc infiniment moins coûteuse à déployer.
En Europe, la politique suivie a été celle d'un déploiement de la fibre optique par les opérateurs privés, éventuellement en situation de concurrence sur les infrastructures mais avec l'obligation de louer à des opérateurs tiers leurs infrastructures. Or les utilisateurs ne sont pas prêts à payer plus faute d'usages.
Catherine Lejealle préconiserait plutôt de suivre la voie de la Corée du Sud, par exemple : « la fibre optique y est considérée comme une infrastructure au même titre que la route et elle est donc payée par l'Etat. » L'Etat devrait donc investir dans le déploiement de la fibre optique car le déploiement en lui-même ne peut pas être rentable. Par contre, les entreprises privées devraient alors investir dans les services qui vont justifier l'existence du réseau très haut débit.
La fibre optique dans tous les foyers n'est pas économiquement justifiée
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La justification économique de la fibre optique jusqu'au domicile (FTTH) reste à établir. Le grand public apprécie le confort mais rechigne à payer plus que pour l'ADSL faute d'usages innovants.
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12 Commentaires
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Je ne partage pas les attendus de cet article. La rupture techno apportée par la fibre existe, elle s'appelle symétrie ! Imaginez les services et les usages quand vous partagerez le contenu multimédia de votre "box" / réseau local / appareils photos / smartphone directement avec votre famille, vos amis... Là sous ADSL 1Mb/s en upload, j’attends un certain temps pour faire développer mes photos, pour la video, j'attendrai...
Signaler un abusCôté économique : l'ADSL, techno d'entreprise à l'origine, ne s'est développé qu'avec son développement grand public, normal, une infrastructure quelconque ne peut exister économiquement qu'en partageant sur un grand nombre ; il vaut mieux 100 000 qui paye 30 que 10 qui paye 3 000...
Quand à l'appétence des urbains à la fibre, elle est effectivement plus délicate parce qu'ils sont mieux nourris ! Commençons donc par les campagnes affamées ;-) Plus sérieusement, le Programme National Très Haut Débit qui encourage la fibre pour tous, est relativement bien équilibré entre la participation publique et privé. Là encore, l'article semble faire l'impasse sur l'impossibilité d'un financement 100% Étatique de par les règlements communautaires.
PS : La 4G s'est une techno d'urbain encore, elle apparaitra à la campagne, à la fin, juste pour que les urbains en ballade puissent avoir une connexion touristique, mais les faisceaux partagés et à moindre portée ne pourront prétendre à une couverture étendue de la population rurale ; et je ne compte pas les difficultés engendrées par le relief et les bois. Il y a encore des zones "blanches" en 2G, plus grande en 3G, alors en 4G...
Nous sommes peut-être sur un faux problème ou un problème mal posé... Chaque fois qu'on a fait des plans, on s'est rendu compte (quelquefois dans les décennies suivantes) que l'on s'appuyait sur des technologies du moment, vite remplacées par le progrès technologique, seule révolution en marche (et qui n'est pas prête à ralentir !). Il serait plus sage de se projeter vers un futur où les successeurs de la 4G LTE fournirait un service aujourd'hui inimaginable avec une infrastructure légère (cf. les réseaux de téléphonie mobile qui ont envahi les régions les plus "difficiles" du monde en très peu de temps. Exit la fibre et les xDSL de Cromagnon !
Signaler un abusBonjour, habitant à la campagne, et n'étant toujours pas dégroupé !, je ne souhaite pas financer par mes impôts, un service qui ne me sera pas destiné avant une trentène d'année au moins...........
Signaler un abusNous sommes peut-être sur un faux problème ou un problème mal posé... Chaque fois qu'on a fait des plans, on s'est rendu compte (quelquefois dans les décennies suivantes) que l'on s'appuyait sur des technologies du moment, vite remplacées par le progrès technologique, seule révolution en marche (et qui n'est pas prête à ralentir !). Il serait plus sage de se projeter vers un futur où les successeurs de la 4G LTE fournirait un service aujourd'hui inimaginable avec une infrastructure légère (cf. les réseaux de téléphonie mobile qui ont envahi les régions les plus "difficiles" du monde en très peu de temps. Exit la fibre et les xDSL de Cromagnon !
Signaler un abusNous sommes peut-être sur un faux problème ou un problème mal posé... Chaque fois qu'on a fait des plans, on s'est rendu compte (quelquefois dans les décennies suivantes) que l'on s'appuyait sur des technologies du moment, vite remplacées par le progrès technologique, seule révolution en marche (et qui n'est pas prête à ralentir !). Il serait plus sage de se projeter vers un futur où les successeurs de la 4G LTE fournirait un service aujourd'hui inimaginable avec une infrastructure légère (cf. les réseaux de téléphonie mobile qui ont envahi les régions les plus "difficiles" du monde en très peu de temps. Exit la fibre et les xDSL de Cromagnon !
Signaler un abusBonjour, habitant à la campagne, et n'étant toujours pas dégroupé !, je ne souhaite pas financer par mes impôts, un service qui ne me sera pas destiné avant une trentaine d'années au moins...........
Signaler un abusL'article commençais bien, c'est vrai, je suis d'accord qu'économiquement, la fibre pour tous est une gageure, mais ensuite, Mme Lejealle propose de délocaliser le coût supplémentaire de la fibre des abonnés, abonnés qui ne veulent pas payer plus, vers l'état qui devrait investir dans le déploiement de la fibre. Mais l'abonné (moi) voudra-t-il payer plus d’impôts pour avoir une fibre qu'il ne veut pas se payer car elle est trop cher ? C'est déplacer le problème à un autre endroit, c'est inutile...
Signaler un abusC'est aussi, partiellement, inutile en ville; j'habite au centre ville (hypercentre) d'une des 5 plus grosses villes de France et je suis à 2384 mètres du DSLAM => Donc VDSL2 inutile (en ville)
Signaler un abusAu tout début de la téléphonie, l'usage que nous connaissons désormais n'était qu'esquissé : celui qui apparaissait le plus évident pour ce nouvel outil consistait à diffuser des pièces de théâtre !
Signaler un abusIl est prudent de réfléchir et de trouver des solutions, mais pas durant des décennies...
D'accord avec Visiteur1976 sur le fait que de nombreux foyers ne peuvent actuellement prétendre à un débit ADSL de plus de 256Ko faute d'infrastructure adéquate et/ou trop loin d'un répartiteur. Je suis aussi d'accord avec thinker sur le fait que le xDSL, en tant qu'évolution de l'ADSL est une très bonne solution pour augmenter les débits sans faire exploser les coûts mais attention au piège de ce dernier car là où je vis (quelque part en Europe), les débits descendant sont très nettement privilégiés aux débits montants et ce, dans des proportions parfois inacceptables: 24 MB (théoriques - 8 MB réels) pour le download et à peine 1MB en upload... et rien à faire pour changer ça!!
Signaler un abusPas d'accord avec thinker. Le VDSL2 n'est pas du tout intéressant pour la campagne car à moins d'habiter à moins de 1200m du DSLAM il n'apporte rien de plus que l'ADSL
Signaler un abusOn sait depuis longtemps que les xDSL (VDSL2, par exemple) ont été choisis par bon nombre de pays pour le très haut débit ; en plus c'est beaucoup plus adapté à une configuration mixte ville/campagne.
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