Le secteur des nouvelles technologies entend prendre son envol en Europe. A l’issue de deux journées de conférences et échanges entre chercheurs, investisseurs, dirigeants d’entreprises et responsables politiques sur la souveraineté numérique européenne, la France a précisé les contours de l’initiative Scale-up Europe. Ce mouvement, lancé en mars 2021 à Station F, l’incubateur de start-ups basé à Paris, veut accélérer sur le plan européen. « Les résultats sont là, l’Europe redémarre fort, elle a devant elle la possibilité de jouer les premiers rôles au XXIe siècle entre la Chine et les Etats-Unis » a déclaré le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire. « Nous voulons bâtir un modèle dans lequel nous aurons les capacités d'investissement pour grandir dans ces fameuses entreprises ». Il est notamment revenu sur son annonce d’un fonds de fonds.
Bruno Le Maire l’a annoncé lundi, un fonds européen de scale-ups est créé à l’issue de cette conférence ministérielle et « va rassembler 10 à 20 fonds pour un montant total minimal d’un milliard d’euros pour financer les champions de la technologie ». Dans le détail, plus de 3,5 milliards d’euros d’argent public vont assurément être injectés dans ce fonds selon la répartition suivante : la France va mettre 1 milliard d’euros (provenant du plan France 2030), au même titre que l’Allemagne. La BEI (Banque européenne d’investissement) va contribuer à hauteur de 500 millions d’euros. « Il s’agit d’une contribution en capital au fonds de fonds européen et des financements directs, au cas par cas, à des entreprises soutenues par l’initiative. Cette contribution pourra être complétée au fur et à mesure du déploiement de l’initiative » a précisé le ministre.
La France et l’Allemagne se rêvent en grands éclaireurs ?
Alors que la France et l’Allemagne ont ouvert la voie, quels sont finalement les autres pays de l’Union européenne qui suivront le mouvement ? Le Danemark compte mettre 500 millions d’euros via sa banque publique d’investissement. La Grèce a répondu à l’appel, annonçant un investissement de 200 millions d’euros via la Banque hellénique de développement. La France s’engage encore plus loin et promet par ailleurs 500 millions d’euros via son véhicule Bpifrance. La gestion de ce fonds de fonds sera confiée au Fonds Européen d’Investissement (FEI), et à la mobilisation des banques publiques nationales. 18 Etats membres – la France, la Bulgarie, le Danemark, l’Allemagne, l'Estonie, la Grèce, l'Espagne, l'Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Autriche, le Portugal, la Roumanie, la Slovénie, la Finlande, la Suède ont soutenu publiquement cette initiative dans le cadre d’une déclaration conjointe. Le gouvernement français espère atteindre les 10 milliards d’euros « pour que nos entreprises grandissent, créent des emplois sur le territoire européen et nulle part ailleurs ».
L’objectif ambitieux de créer plus de 10 géants technologiques valorisés à plus de 100 Md€ au sein de l’Union européenne avant 2030 pourra-t-il être atteint ? C’est en tout cas ce qu’espère le secrétaire d’Etat à la transition numérique et aux communications électroniques, Cédric O. L’Europe a accumulé un retard considérable ces 30 dernières années en matière d’innovation. « Un seul chiffre le résume : sur les 10 plus grandes entreprises du monde, 8 sont dans la tech, 6 n’existaient pas il y a 25 ans, aucune n’est européenne ». Cependant, la dynamique s’inverse : en 2021, l’Europe, pour la première fois, a créé plus de licornes que la Chine. Fin 2021, l’Europe comptait 321 licornes dont 21 françaises. Espérons que ce ne soit pas qu’un effet de mode et que cette dynamique perdure en France comme partout en Europe.
L'Europe est-elle vraiment sur la bonne voie ?
« L’Europe trace son chemin. Elle impose ses règles et ses standards. Avec scale-up Europe, elle affiche son ambition technologique » a conclu Cédric O, clôturant ainsi cette conférence sur la souveraineté numérique européenne. Reste qu'avec 10 milliards d'euros, l'Europe s'affiche comme un nain au regard des sommes investies, par exemple, par Vision Fund 1 : 100 milliards de dollars, à l'initiative du CEO de SoftBank, Masayoshi Son, avec le concours de Qualcomm et Apple. Et la vision étatique des nouvelles technologies a, de plus, très souvent du mal à miser sur des technologies innovantes. Rappelez vous l'investissement prometteur de Bpifrance dans Viadeo, juste avant l'effondrement de la société, et mieux encore les déconvenues de la "pépite" Qwant.
Dans le semiconducteur , une petite usine de fabrication (FAB) entierement automatisée comme a construit Bosch à Dresde coute 1 milliard d'euro (mais ce n'est pas pour les technologies les plus avancées et c'est une tres petite fab). Une nouvelle fab moyenne couterait 10 milliards. Une nouvelle mega fab avec la technologie la plus avancée comme Intel va construire dans l'Ohio ou envisage de construire en Europe continentale , c'est presque 100 milliards.
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