Le coût, mais pas uniquement. La Linux Foundation vient de dévoiler une étude sur la valeur économique de l'open source. Placée sous la responsabilité de Henry Chesbrough, un professeur à l'université de Berkeley (Californie) spécialiste de l'innovation ouverte, cette recherche montre que le choix du logiciel libre ne se résume pas à la gratuité de l'accès au code des applications. Certes, l'argument des économies budgétaires est vu comme un avantage très important de l'open source par 28% des décideurs IT interrogés. Mais ils sont 29% à mettre en avant l'interopérabilité et les standards ouverts qui accompagnent ces technologies. Par ailleurs, 24% des entreprises voient l'open source comme un vecteur pour accélérer les développements, tandis que 22% l'associent à une garantie d'indépendance vis-à-vis des éditeurs propriétaires. En additionnant les réponses associant chaque item à un bénéfice très important et à un bénéfice important, les réductions de coûts arrivent cette fois à se hisser en première position (citées par 67% des organisations), mais elles sont talonnées par la rapidité de développement (66%).
Si on se penche sur les coûts générés par l'usage de l'open source, c'est la correction des failles de sécurité qui est le plus fréquemment citée, devant les coûts de support dus à un manque d'offres commerciale. Mais ces items ne génèrent des coûts élevés ou très élevés que pour 24 et 23% des entreprises respectivement. Les dépenses engendrées par la réduction des incertitudes juridiques associées au licensing ne sont, elles, soulignées que par 19% des répondants.
Moins cher qu'un développement maison ou un logiciel propriétaire
La conséquence logique de ce déséquilibre entre gains et coûts ? 54% des organisations interrogées estiment que les bénéfices de l'open source sont supérieurs ou largement supérieurs aux coûts qu'il engendre. Notons tout de même que 17% des entreprises sont d'un avis opposé. Près d'une entreprise sur deux estime que ce ratio bénéfices/coûts a évolué positivement au cours des cinq dernières années, contre 16% qui sont de l'avis inverse.
Interrogées sur un projet récent de nouveau produit ou service mis en service par leur organisation, 50% des répondants à l'étude estiment que plus de 40% du code assemblé pour cette initiative est issu de l'Open Source. Et deux tiers de ces mêmes décideurs expliquent que produire en interne les fonctionnalités apportées par l'open source aurait coûté plus cher (46% des entreprises affirment même que les coûts ont été divisés par plus de deux via le recours au logiciel libre). « Et même si l'open source coûte plus cher qu'un développement interne, certaines organisations continuent à le privilégier parce qu'il est disponible immédiatement », relève Henry Chesbrough. L'achat d'un logiciel propriétaire, autre alternative à l'open source, est encore jugée plus coûteuse que le développement maison, puisque 77% des organisations interrogées estiment qu'il se serait soldé par un surcoût. Pour 55% des entreprises, les coûts auraient alors été multipliés par deux ou davantage par rapport à l'open source (support inclus).
Des bénéfices sous-estimés
« Si on se base sur l'organisation médiane ayant répondu à l'enquête, la valeur économique des logiciels libres se situe entre une et deux fois leurs coûts d'utilisation, écrit Henry Chesbrough. Cette médiane masque par ailleurs une disparité aux extrémités du spectre : très peu d'entreprises (3%) considèrent que les coûts de l'open source sont bien supérieurs à ses avantages. En revanche, 22% des répondants estiment que sa valeur dépasse largement les coûts générés. » L'économiste pointe par ailleurs le fait que les bénéfices de l'open source évalués par l'étude sont probablement sous-estimés, car ils occultent les gains qu'une organisation peut retirer de sa participation à des communautés et projets, ainsi que la valeur globale de l'open source pour la société (l'étude se focalisant sur les bénéfices internes à une organisation).
Parmi les 431 organisations américaines interrogées (pour moitié réalisant moins d'un milliard de dollars de chiffre d'affaires et pour moitié davantage), un tiers a recours à l'open source depuis 15 ans ou davantage. Mais il faut aussi noter l'existence d'une vague d'entreprises ayant commencé à travailler avec des logiciels open source tout récemment. Entre 2016 et 2021, 46% des organisations interrogées ont ainsi démarré leurs usages du logiciel libre.
Or, pour Henry Chesbrough, la durée de l'expérience d'une entreprise avec l'open source a un impact direct sur la valeur qu'elle est en mesure d'en retirer : « certaines organisations apprennent à mettre l'open source au service de leur stratégie, en façonnant leur environnement dans un sens qui leur est favorable. Et il est probable qu'une plus grande expérience dans l'usage des logiciels libres renforce encore ces avantages. Cela signifie que les organisations qui n'ont pas encore adopté ce type de technologies devraient passer outre les coûts initiaux, liés à l'adoption, pour s'inscrire dans une perspective à plus long terme visant à tirer le meilleur parti de l'open source. »
C'est peut être déjà dans l'article de Berkeley, mais Open et Libre, c'est très différent. Le logiciel libre n'impose aucune contrainte (interdire le nucléaire, la défense ou les -18 ans), tandis que l'open, c'est je m'ouvre, mais sous conditions. L'open peut rester "propriétaire", tandis que le libre se métamorphose en domaine public. Alors oui, aux yeux d'une direction IT, ca change pas grand chose, mais au yeux de l'humanité, ça change tout.
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