Les risques de pratiques anticoncurrentielles sont très élevés, rapporte l’Autorité de la concurrence qui vient de rendre son avis sur l’intelligence artificielle. Le président de l’institution s’est autosaisi du sujet en février dernier en lançant une consultation publique auprès d’une quarantaine d’acteurs et d’une dizaine d’associations. Si l’avis est consultatif, il envoie un signal à l’écosystème de l’IA afin qu'il corrige certaines pratiques.
En premier lieu, l’autorité observe des barrières à l’entrée très élevées sur ce marché. Elle cible notamment le recours à des puces spécialisées, un secteur dominé par les accélérateurs GPU de Nvidia. Ce dernier a d’ailleurs fait l’objet d’une inspection surprise des agents de l’Autorité de la concurrence dans ses locaux français en septembre dernier. En deuxième lieu, les acteurs du cloud sont des passages obligatoires pour accéder à la puissance de calcul, car l’entraînement et l’inférence des modèles sont très gourmands en ressources IT. Autre élément, pour entrer sur ce marché, il faut avoir accès à de grands volumes de données hypothéqués par l’existence de procédures judiciaires comme celle du New York Times contre OpenAI et Microsoft. Enfin, l’organisme constate que l’ampleur des investissements nécessaires constitue un blocage pour les nouveaux entrants.
Une cascade de pratiques potentiellement condamnables
A chaque étage de l’IA, l’Autorité pointe une succession de pratiques anticoncurrentielles. Sur les composants, les risques sont multiples, « la fixation de prix, des restrictions de la production, des conditions contractuelles déloyales ou des comportements discriminatoires ». Sans oublier, le risque de dépendance par rapport à Cuda, l’environnement logiciel incontournable de Nvidia. Le régulateur s’inquiète aussi des investissements de ce dernier dans des fournisseurs de services cloud spécialisés dans l'IA tels que Coreweave. Les fournisseurs de cloud sont montrés du doigt sur le verrouillage financier et technique avec la distribution de crédits cloud très élevés auprès des start-up ou la mise en place d’obstacles pour la migration. Le refus d’accès aux données, les investissements dans l’IA (comme par exemple ceux de Microsoft dans OpenAI) ou les clauses de non-débauchage d’experts peuvent constituer des pratiques litigieuses.
L’Autorité de la concurrence ne fait pas qu’agiter le chiffon rouge, mais propose aussi des recommandations. La première est la création d’offres MaaS (model as a service) et l'identification d'entreprises soumises aux obligations du DMA européen. L’organisme veut mobiliser l’ensemble des outils juridiques (IA Act, droit de la concurrence…) pour contrôler et surveiller les pratiques des acteurs, mais aussi faciliter le développement d’un écosystème vertueux notamment avec l'open source. Une attention particulière sera portée aux investissements dans les entreprises d’IA et les risques de concentration.
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