Si nous nous sommes longtemps interrogés sur la cohérence de la stratégie cloud d‘Oracle, l’éditeur a fini par comprendre qu’il ne pouvait plus faire l’impasse sur cette technologie embrassée par ses concurrents directs. Et pour se distinguer et rattraper son retard, big red mise aujourd’hui sur l’automatisation. En 2017, lors de l’Oracle OpenWorld, l’éditeur avait déjà lancé une « base de données autonome ». À l’époque, le fondateur et CTO Larry Ellison avait affirmé que cette base de données pourrait fonctionner automatiquement sans administrateur de base de données, et qu’elle comprendrait des fonctions d'auto-configuration, d'auto-provisionnement et d'auto-correction.
Pour arriver à cela, Oracle a doté sa base de données - commercialisée sous le nom d'Oracle 18c - de techniques d'apprentissage machine capables d’anticiper et d’automatiser n’importe quel scénario. « La base de données autonome d’Oracle est maintenant globalement disponible dans le cloud d’Oracle, et d'autres services cloud autonomes seront prochainement ajoutés », a déclaré cette fois M. Ellison lors d'une conférence téléphonique sur les résultats du troisième trimestre 2018. « Aucun autre fournisseur de cloud ne dispose d'une base de données entièrement automatisée, d’un système qui traite automatiquement et immédiatement de la sécurité des actifs sans temps d'arrêt programmé. Les fonctions autonomes de la base de données d'Oracle sont absolument uniques ».
Une offre PaaS automatisée
Mais ce n’est pas tout. Au mois de février, le fournisseur a réaffirmé ces promesses en annonçant qu'il allait étendre le niveau d'automatisation bien au-delà de la base de données, puisque celui-ci concernerait tous les autres éléments de sa plate-forme cloud. Autrement dit, toutes ses offres PaaS seront auto-contrôlées, auto-sécurisées et autoréparables. « Avant la fin de cette année, nous fournirons des services d'analyse autonomes, des services de mobilité autonomes, des services de développement et d'intégration autonomes. La nouvelle suite de services PaaS autonomes d'Oracle apporte un niveau d'automatisation et de réduction des coûts sans précédent à nos clients », a encore déclaré M. Ellison pendant cette conférence téléphonique. « Notre suite de services PaaS autonome et hautement automatisée permet de baisser les coûts en réduisant la main-d'œuvre humaine et améliore la fiabilité et la sécurité en réduisant les erreurs humaines. Aucun autre fournisseur de cloud ne propose quelque chose de ce genre ».
Le but ultime est d'utiliser l'apprentissage machine pour automatiser certaines fonctions IT clés de l'entreprise, comme le tuning, les sauvegardes et les mises à niveau, tout en offrant des performances et une disponibilité élevées. Cette automatisation devrait permettre aux clients de réduire les coûts et les risques et de prendre des décisions plus intelligentes. « L’environnement IT de l'entreprise de demain reposera sur une automatisation complète de bout en bout, et avec les offres d’Oracle, cela devient une réalité », a déclaré pour sa part Amit Zavery, vice-président directeur du développement des produits chez Oracle Cloud après l'annonce. En fait, Oracle estime que d'ici 2020, 80 % des opérations d'application et d'infrastructure seront réalisées de manière autonome. Afin de rendre ces prédictions plus concrètes, Oracle pense que l'ajout d'opérations autonomes simplifiera la gestion et augmentera la productivité. Selon Ray Wang, analyste principal chez Constellation Research, « cette volonté d'Oracle d'autonomiser complètement les opérations IT à travers sa « Pile rouge » est une option intéressante pour les clients. Au fur et à mesure qu'Oracle rattrape son retard dans le cloud, l'automatisation et la différenciation de l'intelligence artificielle pourraient devenir un atout pour l’éditeur en concurrence avec des fournisseurs présents avant lui sur ce marché, mais avec des architectures plus anciennes ».
Oracle peut-il battre la concurrence ?
L’éditeur a été accusé pendant longtemps d'être en retard sur le cloud, et il reste toujours à la traîne derrière les géants du cloud que sont AWS et Microsoft sur le marché lucratif de l'infrastructure en tant que service (IaaS). Selon Gartner, en 2016, Oracle ne se classait même pas parmi les dix premiers de l’industrie dans ce domaine. Cela n'a pas empêché Oracle de faire valoir haut et fort ses compétences en matière de cloud, autant lors de l’OpenWorld qu’à l’occasion de la communication de ses résultats trimestriels. Ainsi, lors de la communication des résultats du troisième trimestre 2018, Mark Hurd, le CEO d'Oracle, a déclaré : « Le fait est que nous prenons des parts de marché et l’ajout d’une base de données autonome à notre pipeline devrait encore renforcer la croissance de notre écosystème technologique ». Oracle peut dire que sa stratégie est payante et que ses derniers résultats financiers montrent que le chiffre d'affaires total du cloud a augmenté de 32 % au troisième trimestre 2018. Cependant, comme le fait remarquer Angela Eager de TechMarketView, « le taux de croissance du cloud a ralenti chaque trimestre », en recul à 44 % au deuxième trimestre et à 51 % au premier trimestre.
Course à l'automatisation
Oracle n'est certainement pas le seul à penser à l’automatisation des ressources cloud. En 2017, le CEO de Microsoft, Satya Nadella, grand évangélisateur du cloud, a transformé le mantra « cloud first, mobile first » d’Azure en mantra « intelligent cloud, intelligent edge ». Depuis, l'entreprise investit massivement dans l'intelligence artificielle et l'apprentissage machine pour offrir aux utilisateurs une plate-forme cloud plus intelligente. La différence avec la stratégie d'automatisation d'Oracle est subtile, mais les deux concurrents avancent toujours dans le même sens. Il faut aussi compter avec l’éditeur allemand SAP, qui teste des usages de l'automatisation avec des clients spécifiques en s’appuyant sur sa plate-forme Leonardo. Brenton O'Callaghan, responsable mondial de SAP Leonardo et Bluefin, a déclaré à nos confrères de Computerworld UK : « L’objectif de SAP en matière d'automatisation et d'entreprise intelligente est différent des autres : il se concentre sur les utilisateurs et les processus métiers plutôt que sur la technologie ». Dans le cas particulier de Leonardo, l’objectif est de fournir des solutions spécifiques aux clients « en donnant la priorité à leurs besoins et à leurs motivations ». « Ces solutions sont ensuite mises en œuvre grâce aux dernières technologies d'automatisation et d'intelligence artificielle utilisant la plate-forme cloud de SAP », a-t-il ajouté. Même si Oracle avait une longueur d’avance sur ce marché en terme d'innovation, il n’est certainement pas le seul à anticiper l'impact de l'automatisation sur l'industrie.
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