La place de marché boursière Euronext résiste à la vague de migrations de ses homologues vers les grands opérateurs de cloud. Alors que son concurrent allemand Deutsche Börse vient d'annoncer le renforcement de son partenariat avec Google, la principale place boursière de la zone euro, qui opère la place de Paris, écarte pour l'instant tout déplacement de ses activités clefs dans le cloud. « L'une des raisons pour lesquelles nous sommes prudents quant à l'utilisation des centres de données de Microsoft, Google et Amazon pour des applications critiques tient au fait que nos principaux superviseurs et régulateurs sont eux-mêmes très prudents », explique le PDG d'Euronext Stéphane Boujnah, à nos confrères de Reuters. Et d'expliquer que sa société a uniquement recours au cloud pour stocker des historiques de données. « Lorsqu'il s'agit d'applications stratégiques telles que des données en temps réel et des opérations du marché, nous ne voulons pas qu'elles soient stockées et exploitées sur des datacenters d'entreprises qui ont des centres de décision en dehors de l'UE, et des infrastructures physiques en dehors de l'UE », reprend le dirigeant, pour clarifier sa position.
La stratégie IT d'Euronext, qui en 2021 a racheté Borsa Italiana, l'opérateur de la bourse de Milan, repose notamment sur la migration de son datacenter principal de Basildon (Royaume-Uni) à Bergame (Italie), un centre Tier-IV fourni par Aruba et déjà exploité par la bourse italienne. Le transfert, opéré l'année dernière, permet aujourd'hui à Euronext de proposer une offre de colocation qu'il gère en propre. Le datacenter héberge surtout Optiq, la plateforme de trading de la société basée à Amsterdam, vers laquelle va également converger Borsa Italiana.
10 ans de partenariat avec Microsoft ou Google
La stratégie d'Euronext tranche avec celle de ses concurrents, qui ont massivement pris le virage du cloud. En décembre, Microsoft annonçait vouloir monter au capital du London Stock Exchange (à hauteur de 2 Md$), tandis que la place boursière s'engageait sur un partenariat de 10 ans avec le premier éditeur mondial, portant notamment sur la migration de sa plateforme data et analytics de LSE vers Azure et sur la construction d'une plateforme de trading basée sur le cloud. Hier, Deutsche Börse annonçait à son tour une extension de son partenariat avec Google Cloud. Une évolution par rapport à la stratégie multicloud jusqu'alors revendiquée par l'opérateur allemand. « Google Cloud deviendra le partenaire cloud privilégié de Deutsche Börse Groups pour les dix prochaines années », écrit la société de Francfort, qui va miser sur l'infrastructure de Google pour accélérer le développement de sa plateforme de trading D7 et bâtir de nouveaux usages de la donnée (notamment basés sur BigQuery).
Si ces partenariats entre des places boursières européennes et les hyperscalers suivent de près l'exemple du Nasdaq américain, qui a finalisé la migration de sa plateforme principale sur AWS en fin d'année 2021, ils sont regardés avec circonspection par les autorités de régulation. Le directeur général de la Banque des règlements internationaux vient ainsi de pointer les risques systématiques que font désormais peser les grands acteurs de tech sur la finance mondiale. « Il ne fait aucun doute qu'une refonte de la réglementation s'impose et que nous avons besoin d'une nouvelle voie », explique ainsi Agustin Carstens, demandant notamment que les services financiers des "Big Tech" soient séparés de leurs autres opérations et que ces acteurs soient exclus de certaines activités financières régulées. Amazon, Google et Microsoft, les nouveaux acteurs 'too big to fail' ?
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