Environ 500 entreprises commerciales et technologiques se sont regroupées au sein de l'Enterprise Ethereum Alliance (EEA) pour mettre au point des standards pour la chaîne de blocs d’entreprise. Sa première spécification Enterprise Ethereum Client Specification 1.0 livrée la semaine dernière doit permettre le développement de réseaux pair-à-pair décentralisés destinés explicitement à automatiser les transactions d’entreprise. Le framework open source permet d’accélérer les transactions commerciales, de renforcer la confidentialité des contrats et de créer un flux de transactions commerciales plus rapide et plus efficace. La spécification de l’EEA et sa pile d'architecture sont basées sur les composants blockchain développés par la Fondation Ethereum, l'organisation à l'origine d’Éther, seconde cryptomonnaie ayant le plus de valeur après le Bitcoin. Grâce à la nouvelle spécification de l'Enterprise Ethereum Alliance, les développeurs peuvent écrire du code permettant l'interopérabilité entre les entreprises et leurs clients, soit sur une chaîne autorisée, soit sur une chaîne de blocs publics.
La spécification permet au framework de gérer l’autorisation nécessaire pour rejoindre un réseau blockchain. « Actuellement, le protocole Ethereum offre de grandes capacités en terme de transfert de valeur et d’échange de monnaie Ether entre personnes. Il sert de base à une modalité de levée de fonds par émission d’actifs numériques, les Initial Coin Offerings ou ICO », a déclaré Tom Lombardi, responsable du développement du marché de l'EEA. « Mais L'objectif de l'alliance est de développer un framework utilisable avec Ethereum. « Ces grandes entreprises ont des difficultés avec la conformité, elles sont confrontées à des obstacles juridiques et à divers niveaux de bureaucratie qui les obligent à répondre à mille contraintes avant de pouvoir utiliser une technologie comme celle-ci », a encore déclaré M. Lombardi.
Vers une efficacité transactionnelle améliorée
La Pile Enterprise Ethereum Client Specification 1.0 (Crédit : EEA)
La spécification blockchain, et sa pile d’architecture, peuvent apporter une plus grande efficacité transactionnelle parce qu'elles permettent de « sortir » les données de la chaîne ou du registre principal et de les traiter dans une base de données séparée derrière un pare-feu. La chaîne de blocs primaire peut servir uniquement à valider les transactions terminées et à créer un hachage différent pour représenter les données hors ligne pour des raisons de confidentialité et de sécurité. Le concept de traitement de l'information hors de la chaîne de blocs est en train de faire son chemin, car il permet d’accroître l'efficacité des réseaux blockchain, laquelle a parfois besoin de plusieurs minutes pour traiter une seule transaction. Par exemple, il faut en moyenne 10 minutes à la chaine bitcoin pour traiter une transaction. « Ethereum atteint 13 à 14 transactions par seconde, ce qui n'est pas adapté à la demande de l'entreprise », a déclaré M. Lombardi, lequel estime « qu’il n’est pas nécessaire que tout se passe au niveau de la chaîne de blocs elle-même ».
L'Enterprise Ethereum Client Specification a été créée par un comité de pilotage technique. Celui-ci va continuer à enrichir la spécification avec les contributions des membres jusqu'en octobre afin de livrer une version 1.1 de l'Enterprise Ethereum Client Specification. Celle-ci inclura plus de frameworks pour des applications spécifiques à l'entreprise. « Chaque membre, que ce soit une petite ou une grande entreprise, détient une voix, », a déclaré le directeur exécutif de l'EEA, Ron Resnick, au moment de l'annonce de la semaine dernière. « Nous préparons pour cette date l’implementation d'un programme de certification qui sera basé sur la version 1.1 ». Cette spécification, qui vise à favoriser la création d’applications d'entreprise basées sur la chaîne de blocs pour les données transactionnelles, est importante parce qu'elle fournira une norme d'interopérabilité entre les entreprises utilisant les réseaux distribués.
Créer des applications blockchain taillées pour le futur
Selon Thomas Mason, analyste de recherche chez S&P Global Market Intelligence, elle permettra également aux entreprises de réorganiser les réseaux blockchain en vue d'utilisations futures. « Les entreprises se lancent souvent la tête la première dans les nouvelles technologies et font appel à une start-up pour développer une application répondant à un objectif commercial spécifique. Souvent aussi, elles découvrent après l'expiration du contrat du fournisseur que l'application ne répond pas à leurs besoins. Mais, une fois que l'application a été développée, elle ne peut pas être modifiée, car elle a été conçue pour répondre à un usage déterminé », a ajouté M. Mason. « La nouvelle spécification permet aussi aux développeurs de créer des applications qui, même si l’entreprise ne veut pas les utiliser pour des registres distribués publics, conservent toujours cette capacité », a-t-il encore déclaré. Les chaînes de blocs publiques, comme le bitcoin, n'ont pas d'autorité centrale ; le registre est régi par un système de consensus entre utilisateurs.
Inversement, une chaîne de bloc privée ou « autorisée » est régie par un administrateur central qui est chargé de contrôler ceux qui sont autorisés à rejoindre la chaîne de blocs. Des partenaires commerciaux ayant un but commun peuvent être amenés à créer une chaîne de blocs autorisée, comme celle utilisée pour les transactions financières transfrontalières ou les chaînes d'approvisionnement. Les sociétés internationales peuvent également créer des chaînes de blocs internes autorisées pour réaliser des transactions entre plusieurs divisions ou unités d'affaires. En plus des chaînes de blocs autorisées, les entreprises peuvent également utiliser des chaînes de blocs publiques pour financer des projets en vendant des cryptomonnaies par émission d’actifs numériques ou ICO - dans le cas présent, des jetons Éther - ou pour valoriser la fidélité de la clientèle en émettant des jetons.
Echanger des points de fidélité contre de la cryptomonnaie
Certaines entreprises envisagent par exemple d'utiliser les réseaux blockchain pour permettre aux clients d'échanger des points de fidélité contre des jetons. Un client achète telle quantité de produits chez un détaillant, et obtient en contrepartie des jetons qu’il pourra échanger. La valeur du jeton, comme toute cryptomonnaie, est déterminée par le marché. La blockchain d’Ethereum consiste en une série de protocoles qui définissent une plate-forme pour des applications décentralisées ou Apps. Comme d'autres chaînes de blocs dans le genre d’Hyperledger, Ethereum a la capacité d'exécuter des « contrats intelligents » : quand certaines conditions d'un contrat sont remplies, la chaîne de blocs exécute automatiquement certaines actions. Par exemple, dans une transaction immobilière, une fois que toutes les parties ont accepté les conditions de la transaction en inscrivant leur consentement dans la chaîne de blocs - et que les banques ont approuvé un transfert d'argent - celle-ci peut automatiquement exécuter cette transaction.
La capacité d'Ethereum à exécuter des contrats intelligents s'appelle Ethereum Virtual Machine (EVM) et elle peut exécuter du code algorithmique de complexité variable. Les développeurs peuvent créer des applications qui tournent sur l'EVM en utilisant des langages de programmation conviviaux modélisés à l’aide de langages existants comme JavaScript et Python. « Nous pensons que d'ici le début de l’année 2019, la mise en œuvre de la certification devrait être en bonne voie », a déclaré M. Resnick. « Cela permet à tous les développeurs de s'impliquer et de voir ce que nous faisons. Nous prévoyons aussi de grandes nouveautés pour le reste de l'année ».
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