Comme un marathon, le travail sur un datacenter est une course d’endurance. « Pour le site PAR8, l’aventure a commencé en 2013 sur le site d’Airbus Industrie Helicopter et la dernière tranche du bâtiment sera livrée en 2025 », se souvient Fabrice Coquio, président de Digital Realty France (ex Interxion). Au total 40 000 m² de salles machines (correspondant à 7 terrains de football) et 120 Mwatt de puissance électrique sont disponibles aux portes de Paris (entre la Courneuve et Aubervilliers) pour des acteurs variés, « des opérateurs télécoms, des fournisseurs de cloud, des acteurs labellisés SecNumCloud comme Bleu, S3NS ou Outscale, mais aussi des applications critiques de l’Etat », explique le dirigeant. Par contre, aucun acteur chinois n’est présent sur ce site, assure-t-il.

Un fort besoin de connectivité pour les JO

Une entrée en matière pour indiquer que le site dont l’investissement dépasse les 1,1 milliard d’euros est capable de passer à l’échelle et d’être « un hub de la donnée » notamment pour les grands évènements et en particulier pour les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris qui se tiendront cet été. « Les JO vont générer des quantités énormes de données et les datacenters vont avoir un rôle important à jouer sur plusieurs enjeux », glisse Fabrice Coquio. Le premier défi est la connectivité, « tout le monde veut regarder la finale du 100 mètres ou de tennis en temps réel et derrière l’envoi de la donnée, il y a des câbles enterrés, sous-marins et aujourd’hui des liaisons avec des constellations de satellite », précise-t-il.

Digital Realty dispose d'une salle dédiée concentrant l'ensembles des opérateurs de connectivité. (Crédit Photo : JC)

Au sein de PAR 8, le fournisseur concentre à la fois les liens opérateurs télécoms (pas moins de 150 opérateurs sont référencés) , mais aussi les acteurs de CDN comme Cloudflare, Limelight ou Akamai, ainsi que des points de peering. « Aujourd’hui, le transfert de données entre Paris et Marseille prend 8 ms et pour l’Asie 115 ms ». Une salle dédiée concentre l’ensemble des fibres optiques de ces différents acteurs où les techniciens interviennent pour changer les jarretières à la demande des clients. Habituellement, il y a 30 à 40 demandes par mois. Pendant les JO, il y aura beaucoup plus de demande », assure Fabrice Coquio. Et de mettre l’accent sur un volet oublié des Jeux Olympiques, c’est l’aspect télétravail. « Les dernières estimations montrent que 29% des salariés en Ile de France seront en télétravail et cela implique une forte demande sur les outils collaboratifs ».

Une sûreté physique renforcée et une résilience éprouvée

L’autre grand enjeu est la cybersécurité et la sûreté des infrastructures. Si les spécialistes s’attendent à une multiplication des attaques (par 8 a minima, voir 30 pour les plus pessimistes), Digital Realty se positionne notamment sur la question de la sûreté physique. « Il y a 7 points de contrôle avant d’arriver dans les salles machines » et de rappeler le label SecNumCloud de certains clients imposent un niveau de sûreté très élevé dans les bâtiments.

Pour la résilience électrique, PAR 8 disposera à termes de 72 groupes de secours autorisant une autonomie de 72 heures à pleine charge. (Crédit Photo: Digital Realty)

Autre point, la résilience en cas de scénario catastrophe comme un blackout électrique due à une cyberattaque ou autre. Dans ce cas, «  nous disposons de groupes de secours d’une capacité de 3 Mwatt chacun. Ils ont été modernisés avant ils fonctionnaient avec du fioul, maintenant avec du HVO, de l’huile végétale ou animale retraitée, pour baisser l’empreinte carbone », précise Fabrice Coquio. Pas moins de 72 générateurs sont présents sur les toits des bâtiments (à la finition de la 4ème tranche), « en pleine charge ce qui arrive rarement, nous pouvons tenir jusqu’à 72 heures, en activité normale, l’autonomie est de 96 à 100 heures », observe-t-il. Le site dispose de plusieurs  points d’adduction d’électricité dont 8 câbles Enedis et ses propres lignes HTB2 redondées.

L’IA change la donne électrique pour les datacenters

La question de la consommation électrique est très important pour un datacenter. Dans le cadre des JO, Digital Realty s’attend à un pic de 20% en plus qu’une période normale. En sachant que sur les 120 Mwatt disponibles 80 sont mobilisés pour les salles informatiques, 20 Mwatt servent pour le bâtiment. « La différence est en partie consommée par les équipements de Digital Realty et nous gardons une petite sécurité en cas de pic d’activité », détaille Fabrice Coquio.

Au-delà des JO, le dirigeant a été interrogé sur l’IA et son impact sur les datacenters. « L’IA va transformer radicalement la façon dont on pense les datacenters en termes de refroidissement », reconnait-il. « aujourd’hui, les plateformes IA requièrent 100 kw pour les refroidir. Or, le refroidissement par air ne peut pas aller au-delà de 22 kw. La seule option est le refroidissement par eau ». Au sein de PAR8, Digital Realty a installé un système dit DLC (direct liquid cooling) en créant des boucles injectant de l’eau à 35°C et la récupérant à 45°C, l’eau est ensuite refroidie soit par l’air extérieur (si le temps le permet) ou via une machine. Cette méthode DLC sera perfectionnée (par du refroidissement adiabatique) et nativement intégrée dans le prochain datacenter de Digital Realty à Dugny pour un investissement de 2 Md€ et une puissance attendue de 200 Mwatt.

PAR 8 sera complètement achevé en février 2025 avec la quatrième et dernière tranche. (Crédit Photo: Digital Realty)