Après 2 ans de sevrage, plusieurs reports pour raisons sanitaires et une édition 2020 totalement digitale, la Semaine de l’innovation des transports et de la logistique (SITL) a bel et bien rouvert ses portes le 13 septembre. Elle a accueilli quelque 550 exposants durant 3 jours au Parc des expositions de la porte de Versailles.
Plus de 550 exposants
Les chiffres de la fréquentation ne sont pas encore tombés, mais elle sera sans doute inférieure aux éditions précédentes, comme le pressent Thomas Desplanques, directeur de l’événement. Reste un enthousiasme palpable à l’idée de se retrouver. Pour preuve, dès le premier jour, une impressionnante file d’attente longeait le site une heure avant même l’ouverture aux non-exposants. Au contrôle du badge et des sacs, s’ajoute en effet cette année celui du pas sanitaire. Mais l’envie de la profession de se retrouver l’a visiblement emporté sur les récriminations qu’une telle situation aurait habituellement entrainées. « Il y a un peu moins de visitorat, mais plus qualitatif, estime même Thomas Desplanques. Il fallait repartir, recréer les connexions. »
Un soutien financier du gouvernement au ferroviaire
Pour lancer officiellement l’événement, le Ministre délégué auprès de la ministre de la Transition écologique, chargée des Transports, Jean-Baptiste Djebbari a coupé un symbolique ruban rouge. Et comme il est de coutume, il n’est pas venu les mains vides. Le gouvernement a en effet engagé un nouveau plan de soutien au fret ferroviaire de 170 M€ annuels de 2022 à 2024. Cette somme comprend la « prise en charge à hauteur de 50 % des péages dus par les opérateurs de fret à SNCF Réseau, 70 M€ pour les wagons isolés, 47 M€ pour l’exploitation des services de transport combiné et 15 M€ pour les autoroutes ferroviaires. »
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Juste avant le discours du ministre, lors de la première conférence du salon, les intervenants l’avaient indirectement interpellé à propos du ciblage de certaines subventions dans la logistique. Anne-Marie Idrac, présidente de France Logistique et ancienne patronne de la SNCF comme elle l’a rappelé, a ainsi loué l’idée de viser 20% de fret ferroviaire. Mais elle a également expliqué que l’urgence était plutôt au verdissement du transport routier qui représente encore 85% du trafic. Elle a ainsi insisté sur l’importance de s’intéresser à l’écoconduite des camions, à la meilleure organisation des tournées, etc. Autant de démarches à efficacité immédiate promues au sein du programme Eve (Engagement volontaire pour l’environnement dans le transport et la logistique) qui intéresse tout type d’entreprises, et non uniquement les plus grandes. Des démarches pour verdir le transport tout en préparant les solutions de rechange, qu’il s’agisse de multimodal ou de nouvelles énergies.
Clément Chandon, directeur des produits et de l'homologation du constructeur de véhicules industriels et de bus Iveco lui a emboité le pas, cette fois sur la priorité donnée à l’électrique. Il a critiqué la mesure d’impact environnemental des véhicules et des énergies qui est réalisée « du réservoir à l’échappement » et non « du puits à la roue », c’est-à-dire sur l’ensemble du cycle de vie. « Dire que les véhicules électriques sont zéro émission est le plus grand greenwaching de l’histoire, a-t-il asséné. Il faut utiliser l’argent public pour les énergies décarbonées (nucléaire, NDLR), le bio GNV et l’hydrogène décarboné. »
Développement durable, plus d’environnement que de social
Le développement durable était justement un des axes centraux du salon. Sans surprise pour un secteur dont l’empreinte carbone pèse lourdement dans la balance (8% des émissions totales pour le transport en général, selon plusieurs sources), c’est son pilier environnemental qui tient la vedette. Selon le programme Eve, les transports représentaient 53% des émissions de GES (gaz à effets de serre) en France en 2018, dont 47% pour le transport de marchandises. Ce pilier environnemental du développement durable s’est reflété dans des conférences sur le verdissement des ports, par exemple, ou les spécificités des différentes énergies alternatives au diesel, ou encore sur des stands consacrés à la cyclologistique, aux voies fluviales ou au biogaz. Restera à faire le tri entre greenwashing et véritables stratégies de verdissement du secteur. Même si l’arrivée de nombreuses réglementations en la matière, l’impact sur l’image des entreprises et du secteur, et de véritables convictions pèsent plutôt en faveur de véritables stratégies.
Le pilier social du développement durable s’est fait bien plus discret, même si la pénurie de personnel était présente dans de nombreux discours. Les difficultés de recrutement chroniques qui pèsent lourdement autant sur le transport que dans les entrepôts. Selon les associations professionnelles, il manquerait pas moins de 53000 chauffeurs routiers en France. Une pénurie qui explique l’intérêt de la profession pour des profils encore très mal représentés. Une conférence a ainsi été consacrée à la place des femmes dans le secteur, avec un panel 100% féminin. Indispensable au vu de leur très faible représentation dans les autres conférences…
Le drone d'inventaire allemand de Dock Innovation. (Photo E.Delsol)
Du digital, des drones et ...
Autre thématique très représentée, sans surprise, la digitalisation. Le secteur de la logistique est encore géré avec force documentation papier et tableaux Excel. Nombre de solutions classiques de WMS ou TMS étaient exposées mais aussi des outils, de plus en plus prisés de visualisation des flux de transport. Quelques drones d’inventaire étaient également présentés comme les Inventairy XL de l’Allemand Docks Innovation. Ce dernier présentait un appareil qui reste attaché par un câble à une base mobile, et retourne seul à sa base de recharge. Il est équipé d'une caméra, de deux capteurs de codes-barres et deux capteurs à ultrasons pour éviter les obstacles. Réservé à des marchandises palettisées, son système s’interface directement avec les WMS.
... des robots
Mais ce sont surtout les robots d’entrepôts qui ont attiré les visiteurs. Avec le Français Scallog et ses AGV, et surtout Exotec. La jeune pousse née en 2014 avait mis en place une démonstration d’installation intralogistique miniature. Avec quelques racks, des convoyeurs, et des stations de préparation de commande. Et bien entendu, ses robots qui circulent « librement » dans tout l’espace, transportant des bacs de produits entre les racks, y compris en hauteur et le reste de l’installation. Les essaims de robots sont pilotés par une IA maison. « 70% de notre solution est logicielle, a rappelé à Enjeux Logistiques, Romain Moulin, son DG et co-fondateur. Ce logiciel est conçu pour trouver la meilleure solution logistique pour chaque client par optimisation mathématique. On ne programme pas de solutions pour des systèmes génériques. »
Des entrepôts robotisés, modulaires et évolutifs
La start-up Exotec a présenté ses robots autonomes guidés par IA sur un mini-entrepôt. (Photo E.Delsol)
Exotec a séduit de nombreux clients dont le très exigeant Japonais Uniqlo, pour lequel il a installé deux systèmes au Japon. La start-up répond à une exigence grandissante des chargeurs liée entre autres au succès du e-commerce : ne plus réaliser des installations figées pour des années, mais des entrepôts à la structure adaptable à l’évolution de l’activité. Dopé par le covid-19, le CA d’Exotec a doublé en 2020 et devrait en faire autant cette année pour atteindre au moins 100 M€, selon Romain Moulin.
Alors que le SITL 2021 vient de fermer ses portes, sa prochaine édition du salon est prévue pour les 5 au 8 avril 2022, au parc des expositions de Villepinte cette fois. Mais la SITL continue aussi d’exploiter sa plate-forme digitale MySITL.com lancée au début de la pandémie, en particulier pour les replays de certaines des conférences du salon 2021.
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