Lancé en 2022 sous les auspices de la Commission européenne, le programme Destination Earth (DestinE) vise à concevoir d'ici à 2030 un modèle 3D complet, précis et évolutif de la planète Terre. Cette initiative a pour objectif de lutter contre le changement climatique avec la technologie et d'accroître la compétitivité de l'Europe en la matière. Pour cela, Bruxelles a choisi de concevoir des jumeaux numériques de la Terre permettant de prédire les phénomènes dérivés du changement climatique et d'articuler les politiques publiques nécessaires.

315 M€ ont été alloués au projet dans le cadre du programme Digital Europe. Après la fin de la phase d'idéation, DestinE a lancé deux premiers doubles de la Planète en Finlande, le Climate change adaptation digital twin et le Weather extremes digital twin. Ils affichent déjà des données en haute résolution destinées à de l'analytique et à la conception de scenarii d'adaptation au changement climatique et aux phénomènes météorologiques extrêmes. Avec des contributions de l'UE et de ses membres, le programme vise à regrouper suffisamment de jumeaux numériques, sur les océans, la biodiversité par exemple, pour offrir un double complet et précis de la Planète d'ici à 2030. Le projet est développé en collaboration avec le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT), l'Agence spatiale européenne (ESA) et l'Organisation européenne pour l'exploitation de satellites météorologiques (Eumetsat).

L'exploitation des ressources HPC européennes

Le projet comprend une plateforme de service et un datalake. Cette Core Service Platform , point d'entrée pour tous les utilisateurs, coordonnera l'accès à un cloud sécurisé, de la data et des ressources HPC. Le système DestinE s'appuie sur les infrastructures HPC européennes (EuroHPC) dont le supercalculateur Lumi de Kajaani, en Finlande ou le Marenostrum de Barcelone, en Espagne. La Core Service Platform mettra à disposition des outils d'aide à la décision, des IA, des data analytics à très grande échelle, ainsi que des capacités de monitoring, de simulation et de prévisions des évolutions de la Terre. Elle est sous la responsabilité de l'ESA (Agence spatiale européenne).

Le datalake, lui, regroupera progressivement toutes les données européennes provenant du dispositif d'observation de la Terre du programme Space de l'UE Copernicus, de l'ESA, d'Eutmetsat et de l'ECMWF, mais aussi des data collectées par des capteurs IoT et des données socio-économiques. Dans le même temps, DestinE fournira des ressources réservées à ses utilisateurs pour personnaliser la plateforme, intégrer leurs propres données et développer leurs propres applications. Enfin, les jumeaux numériques proprement dits sont des répliques des différents systèmes hautement complexes qui régissent la Terre et sont développés par l'European Centre for Medium-Range Weather Forecasts (ECMWF). Ils fusionnent des observations en temps réel et une modélisation prédictive en haute résolution du thème concerné (adaptation au changement climatique, événements météorologiques extrêmes.

Un outil pour des secteurs comme l'énergie

De nombreux secteurs économiques sont directement concernés par le potentiel de ces jumeaux numériques. Nos confrères de Smart Energy International citent par exemple Vincent-Henri Peuch, Director de l'engagement avec l'UE à l'ECMWF dans le cadre de la semaine européenne de l'énergie durable. Évoquant les 300 000 utilisateurs des data collectées dans Copernicus depuis les années 1940, il rappelle qu'ils exploitent les données pour des applications liées à l'énergie principalement et de la cartographie 3D évolutive dans le temps. « Les applications les plus communes concernent l'étude des radiations solaires. L'Irena (International Renewable Energy Agency) s'en est servi pour l'évaluation des ressources éoliennes et solaires en Afrique, tandis que le Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d'électricité (ENTSO-E) évalue l'adéquation des ressources avec les besoins.

L'annonce des deux premiers jumeaux marque la fin de la première phase et le début de la seconde, chacune financée à hauteur de plus de 150 M€. La troisième phase et son financement sont soumis à l'accord du programme final Digital Europe 2025-2027, qui est en cours d'élaboration. En outre, un financement supplémentaire a été accordé par le biais d'Horizon Europe pour la recherche et le développement de capacités supplémentaires de jumeaux numériques.