Le Monde Informatique. D'où est parti votre projet de mobiliser des ressources de calcul pour répondre à vos besoins de chauffage ?
Cyrille Elsen. Le projet ScaleMax [co-entreprise créée entre Groupe Casino et Qarnot Computing, NDLR] est parti du constat que la puissance de calcul est énergivore aussi bien dans l’alimentation des serveurs que dans l’énergie à utiliser pour refroidir les systèmes. Nous avons besoin d’optimiser nos besoins en puissance de calcul et aussi notre consommation en énergie. Le concept est de réutiliser la chaleur dissipée par les calculateurs pour chauffer des bâtiments avec la préoccupation d’utiliser une énergie presque entièrement « décarbonée » car les équipements sont alimentés en énergie verte fournie par Green Yellow.
Vers quelle stratégie HPC vous êtes-vous tournée ?
Pour la puissance de calcul , il y a plusieurs axes, certains consistent à concentrer en un seul endroit sur un gros supercalculateur, d'autres de répartir le calcul à travers plusieurs calculateurs. C’est sur ce deuxième point sur lequel nous avons axée notre Stratégie. Cela demande d'avoir une approche type « grille », une conception du calcul qui est un peu différente pour que celui-ci soit compatible avec une algorithmie répartie. Dans ce cas, il faut certes plus d’ingénierie en amont dans la conception des modèles de calcul, mais d’un autre côté vous n’avez pas de gros datacentres à gérer et vous pouvez répartir votre charge de calcul sur plusieurs sites de tailles plus simple à opérer. Deuxième élément de la stratégie est de pouvoir proposer une puissance de calcul lorsque vous n’en avez pas forcément besoin pour vos propres usages. Troisième élément, en internalisant la grille, l’idée est de positionner des centres de calcul dans les sites où les accès sont déjà sécurisés pour les accès physiques et aussi de véhiculer les données de manière confidentielle via des réseaux privés en circuit fermé.
Comment organisez-vous la puissance de calcul disponible ?
On a suspendu des cartes mères en position verticales, ce sont des « homards » comme on les appelle que l'on amène sur des structures métalliques. Cela permet sur 1m3 d'avoir une dissipation thermique intéressante. On fait nous-même nos serveurs, mais à ce stade on ne souhaite pas partager d'information sur leur assemblage.
Quels clients ont besoin de cette puissance de calcul ?
La commercialisation de l'offre est réalisée par ScaleMax et adresse des secteurs variés telles que les banques et assurances, nouvelles technologies, R&D, etc. Nous comptons déjà plus d’une dizaine de clients parmi des grands groupes BNP, groupe Casino, le secteur 3D animation et des start-ups.
Sur quel modèle économique vous basez-vous ?
Cela repose sur la puissance de calcul revendue et sur l’économie réalisée sur le chauffage. Cette activité est profitable dès son 1er exercice et est compétitive.
Y voyez-vous là une forme d'indépendance ?
Je dirai plutôt une meilleure maîtrise du cycle de vie de la données dans nos infrastructures. Je crois fermement qu’il y a encore de l’avenir aussi dans l'infrastructure et la gestion en interne de l’informatique. S’il existait un modèle d'externalisation systématiquement rentable nous l’aurions bien évidemment déjà adopté.
"Co-rentreprise" dans le titre...
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