Comment réduire la forte dépendance numérique des entreprises françaises vis-à-vis des fournisseurs américains en faveur d’acteurs technologiques européens. Cette sur-représentation des solutions venues d’Outre-Atlantique dans les PC et les systèmes d’information pose la question de la souveraineté IT à un moment où la maîtrise des données est devenue stratégique. Des actions concrètes peuvent être engagées, sans délai, pour commencer à rééquilibrer la situation, expose le club des it50+ qui vient d’être constitué à l’initiative de 25 personnalités de la tech française.
Pour les entreprises signataires de la charte it50+, la 1ère action concrète consiste à « intégrer dès à présent au moins 50% d’acteurs européens dans nos appels d’offres », nous a exposé Philippe Pinault, l’un des dirigeants engagés dans cette initiative. Il s’agit simplement, lorsqu’une entreprise consulte 10 fournisseurs pour un projet IT, de s’engager à y inclure 5 sociétés européennes. C’est aussi l’opportunité de découvrir la diversité de l'offre existante, en France et en Europe. « Nous aimerions que les entreprises et les collectivités locales aient cette curiosité », poursuit Philippe Pinault, lui-même à l’origine du réseau social d’entreprise Talkspirit. « Derrière cette initiative, l’idée, c’est de joindre la parole aux actes et de passer des convictions à l’action. On ne peut pas devenir une colonie digitale de sociétés américaines de droit privé, ces sociétés sont devenus extrêmement puissantes, on ne peut pas rester les bras croisés à attendre que cela se passe alors que des solutions existent ». La crise du coronavirus est venue renforcer cette prise de conscience qu’il fallait une véritable alternative crédible face aux acteurs US, souligne-t-il.
Investir 50% des budgets IT dans des technologies européennes
Pour faciliter la recherche de solutions françaises à inclure dans les appels d’offres, le collectif PlayFrance.Digital a publié dès le mois de juin une 1ère cartographie de 300 éditeurs de logiciels et plateformes, répartis par domaines : sécurité, hébergement, conformité, collaboration en ligne, exploitation des données en masse, indexation et recherche, marketing, gestion d’entreprise, finance, analyse de la performance, objets connectés, vidéo en ligne. L’intégration de 50% de fournisseurs français dans les appels d’offres n’est que la première étape. La 2ème consiste à investir 50% des nouveau budgets IT dans la technologie européenne, indique Philippe Pinault.
Une 1ère carte - incomplète - de solutions développées par des éditeurs français dans de nombreux domaines. (agrandir la cartographie réalisée par PlayFrance.Digital)
Deux autres engagements sont demandés aux entreprises qui rejoindront le club it50+ : d’une part, contribuer à travers un budget spécifique à la création d’écosystèmes et de réseaux d’entreprises innovant, d’autre part, produire des communications de référence pour permettre à ces entreprises de pouvoir communiquer, par exemple sur la mise en oeuvre des solutions choisies. « La technologie européenne a besoin d’être mise en avant, d’être valorisée », pointe Philippe Pinault. L’objectif, c’est de pouvoir rééquilibrer dans la durée les technologies informatiques à l’oeuvre dans les entreprises françaises. « C’est un outil qui est là pour concrétiser une démarche, pour passer des mots à des actions tangibles ». Parmi les 25 premiers dirigeants ayant rejoint l'iT50+, on trouve notamment Michel Paulin, DG d’OVHcloud, Viviane Chaine-Ribeiro, présidente du CS de Talentia Software, Gilles Babinet, entrepreneur, Luc Bretones, président de l’institut G9+, ou encore Alain Garnier, DG de Jamespot, qui a lancé PlayFrance.Digital en avril dernier.
Aujourd’hui, de nombreuses solutions SaaS développées par des éditeurs français sont opérées dans des clouds publics américains, ceux d’AWS et de Microsoft, dont les datacenters sont implantés en France. Ce qui continue à poser des questions liées au Patriot Act, par exemple. Mais il y a aussi une diversité d’opérateurs clouds ou d'hébergeurs français parmi lesquels OVHcloud, Scaleway, Outscale, Docaposte ou Ikoula, par exemple. Dans le domaine des logiciels bureautiques, l’open source a jusqu’à présent été la seule alternative aux grandes suites américaines que sont Office ou G Suite. Il existe en la matière une option européenne, OnlyOffice, une solution développée en Lettonie sur laquelle s’appuient déjà certains éditeurs pour compléter leurs plateformes collaboratives.
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