A l'ère de l'IA, les responsables data et/ou analytique doivent se réinventer à l'ère de l'IA, sous peine de voir leurs responsabilités assimilées par les équipes IT de leurs organisations, avertit le Gartner. Selon le rapport du cabinet d'études, les trois quarts des CDAO (Chief Data and Analytics Officer) qui ne parviendront pas à asseoir leur influence à l'échelle de l'entreprise et à démontrer l'impact métier de leurs principales priorités d'ici 2026 seront absorbés par la DSI.
L'IA générative obligeant les entreprises à réévaluer leurs stratégies en matière de données, les CDAO et les responsables data doivent imposer leur leadership et démontrer la valeur métier de leurs initiatives, au-delà de leurs fonctions standard de gestion et de gouvernance des données, conseille Gartner. Dans le même temps, les CDO (Chief Data Officer) et CDAO ont d'énormes opportunités devant eux, notamment en influençant et accompagnant les projets d'IA de leur organisation, mais ils doivent éviter de s'empêtrer dans des batailles de territoire avec les DSI, les responsables de l'IA et d'autres dirigeants, souligne Alan Duncan, analyste couvrant la stratégie data et analytics pour le Gartner.
« L'IA générative a renforcé la nécessité pour les CDAO de se réinventer - et de réinventer leur fonction - sous peine de devenir obsolètes. Pour rester pertinents, les CDAO doivent comprendre les leviers de valeur et les points de douleur de leur organisation afin de gagner en pouvoir, d'accroître leur influence et d'établir des relations de confiance avec leurs pairs de la direction », pointe le rapport du cabinet d'études
Sortir du back-office
La première vague de CDO et de CDAO s'est concentrée sur des tâches administratives telles que la gouvernance des données, leur qualité et leur gestion, mais les personnes qui occupent ces postes doivent désormais devenir plus visibles au sein de l'entreprise, en se concentrant sur leurs apports en termes de valeur, explique Alan Duncan. « Ces fonctions sont plus nécessaires que jamais, mais elles ne sont pas visibles, explique-t-il. Personne ne veut se préoccuper de sa tuyauterie avant d'avoir une fuite ! »
Dans de nombreux cas, les CDO et CDAO n'ont, pour l'instant, pas réussi à démontrer leur valeur, ajoute-t-il. Aujourd'hui ils traversent une période où la qualité des données est directement liée à la réussite des projets d'IA. A eux d'accroître leur visibilité et démontrer leur apport sur ces initiatives : « La GenAI a mis de l'huile sur le feu, et les attentes sont désormais énormes », explique Alan Duncan.
Apprendre à fédérer
Dans certaines organisations, les CDAO peuvent avoir à se battre pour obtenir leur part du gâteau sur ce sujet en vogue, de nombreux responsables informatiques métiers se disputant le leadership sur la stratégie d'IA interne. « Les responsables data et les autres dirigeants devraient s'efforcer de créer un environnement de collaboration, et non de concurrence, dans lequel chacun contribue au succès des déploiements de l'IA », plaide Alan Duncan.
Les CDO, qui ont également du mal à faire comprendre leur rôle à leurs collègues, peuvent mieux démontrer leur apport et leur contribution aux projets d'IA en se concentrant sur leurs compétences interpersonnelles, selon l'analyste. Les CDAO et CDO doivent donc entretenir de bonnes relations de travail avec les DSI, les DAF et les autres cadres, même s'ils ne sont pas toujours recrutés pour leurs compétences en matière de constitution d'équipes, explique l'analyste. « Dans de nombreux cas, les CDO ont été recrutés pour leurs compétences en matière de gouvernance des données, ajoute-t-il. Ils sont embauchés en tant que responsable du delivery, et non comme chef de la diplomatie interne. »
De la défense à l'attaque
Depuis sa création, le rôle du CDO a eu tendance à se concentrer sur la conformité et la gestion des risques, mais le poste doit évoluer, ajoute Christopher Jones, récemment embauché en tant que CTO et CDO chez Nightwing, un fournisseur de solutions de cybersécurité et de renseignement sur la menace, axé sur le marché de la sécurité nationale.
« Il existe un fossé entre la capacité défensive des CDO, autour de la conformité et de la gestion des risques, et leur capacité à influencer positivement les résultats de l'entreprise », explique Christopher Jones, ancien directeur adjoint associé pour la science et la technologie à la CIA. « La manière dont ces objectifs ont été définis dans les organisations des secteurs public et privé les enferme souvent dans une case. » Pourtant, souligne-t-il, la gestion et l'analyse des données, lorsqu'elles sont bien faites, ont un énorme potentiel d'impact sur les résultats de l'entreprise, et les données internes peuvent orienter les organisations vers de nombreuses perspectives, notamment des opérations plus efficaces, de nouvelles opportunités de marché ou des besoins de formation des employés. Le défi pour les CDO et les CDAO ? Remplir leur rôle traditionnel dans la gestion des données tout en attirant l'attention des dirigeants de l'organisation sur les opportunités créées par l'analyse des données, selon le responsable.
Sens de l'urgence
« Partout, les CDO sont confrontés à cette question fondamentale qui consiste à obtenir des données correctes afin de pouvoir tirer parti de l'analytique à grande échelle, et il peut s'agir de chantiers de longue haleine, explique Christopher Jones. Or, les marchés n'ont pas toujours la patience pour cela. Il faut donc agir avec un certain sens de l'urgence ».
Les CDO et CDAO doivent reconnaître que l'IA et l'analyse avancée de données ont bouleversé leur rôle traditionnel, ajoute Todd James, directeur data et CTO chez 84.51°, une entreprise spécialisée dans la Data Science pour le commerce de détail. « Avec l'IA, l'accent a été mis sur l'activation des données par le biais de l'analytique pour générer de la valeur, explique-t-il. L'orientation du CDAO devrait commencer et se terminer par ce sujet de l'utilisation des données au profit des clients et/ou des associés. »
Des voix moins pessimistes
Les fonctions de CDAO et de CDO se trouvent dans une phase de transition unique en son genre, et axée sur l'analytique, selon Todd James. « Après cette transition, le poste de CDO peut se voir scindé, les composantes essentielles de la gestion et de la gouvernance des données revenant à l'informatique, tandis que les parties analytiques de la fonction, plus stratégiques pour l'organisation, peuvent être confiées à des dirigeants métiers compétents en matière de données, explique le CTO de 84.51°. Les CDAO qui ne disposent pas d'une compréhension, d'une expérience et de compétences suffisantes en matière de gestion d'entreprise se retrouveront en danger et moins compétitifs pour le poste que les personnes ayant des parcours professionnels plus diversifiés. »
D'autres experts en données semblent plus optimistes quant à l'avenir du poste. Selon le rapport Voice of the Chief Data Officer, publié en septembre par l'association Data Leaders, l'adoption de l'IA démontre ainsi la valeur d'une bonne gouvernance des données. Le rapport, auquel ont contribué une quarantaine de CDO et CDAO, montre que les responsables data se penchent sur le rôle qu'ils peuvent jouer dans les projets d'IA. Et pointe « le chemin parcouru par les CDO pour établir des relations business et développer leur sens des affaires, compétences qui sous-tendront l'intégration réussie de l'IA. Quel que soit le responsable [de l'initiative, ndlr], la collaboration entre le CDO et le CIO doit être transparente pour garantir la réussite. »
Une longévité supérieure au Chief AI Officer ?
Casey Foss, directeur commercial de la société de services West Monroe Partners, estime également que le poste de CDO/CDAO est d'autant plus essentiel que les entreprises accordent une plus grande importance à la gouvernance, à la fluidité et à l'accès aux données. Dans un récent rapport (What Will the C-Suite Look Like in 5 Years), West Monroe a demandé à des dirigeants âgés de 25 à 45 ans quelles fonctions dirigeantes gagneraient en importance dans un avenir proche. Le rôle de CDO est arrivé en deuxième position, derrière celui de Chief AI Officer, avec 11 % des personnes interrogées qui voient ce poste gagner en importance à l'avenir. Toutefois, 7 % des personnes interrogées ont prédit que la fonction de CDO serait progressivement abandonnée d'ici cinq ans.
Casey Foss fait partie des optimistes. Si le poste de responsable de l'IA attire l'attention à court terme, les CDO ou CDAO pourraient avoir un pouvoir mieux établi sur le long terme, estime-t-elle. « Les données, avec des outils comme l'IA, avec leur prolifération et avec leur monétisation, ne font que devenir plus importantes pour les entreprises du fait de leur capacité à générer de la valeur, dit-elle. Nous assistons à un retournement à court terme autour de ce poste, alors que les gens se focalisent sur l'IA et divisent ce sujet entre le DSI et le responsable de l'IA. Je pense pourtant que le CDO restera en place bien plus longtemps que le responsable de l'IA. »
Chief data officer, un métier déjà mort-né ?
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Selon les analystes, les responsables data et de l'analytique doivent mieux démontrer leur valeur pour l'entreprise et leur apport dans les projets d'IA s'ils veulent conserver leur statut.
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