A l’occasion de Bercy Innov, le 23 janvier 2020, le ministère de l’Économie et des Finances, de l’Action et des Comptes publics a exposé pour la 3e année consécutive, les innovations sur lesquelles il travaille. Réservé jusque-là aux agents de Bercy, l’événement était ouvert pour la première fois à ceux des autres ministères. Résultat, 1500 visiteurs ont exploré les quelque 170 projets présentés contre 70 en 2018. Autre première, des startups privées étaient aussi de la fête aux côtés des startups dites d’État, groupes projets innovants internes aux ministères.
Outre le salon, la journée Bercy Innov propose des agoras, discussions autour de thématiques comme les similitudes entre l’innovation aujourd’hui et à la veille de la Renaissance, ou des ateliers de code. C’est aussi l’occasion de montrer que le Ministère utilise désormais des méthodes d’innovation inspirée du monde numérique avec des organisations agiles et collaboratives, de l’intraentrepreneuriat, de l’innovation ouverte avec des startups, etc.
Des services innovants aux usagers et d'autres modes de travail
Certains ateliers de découverte de l’intelligence artificielle par exemple, se sont déroulés au Bercy Lab, à la fois espace de travail et dispositif d’accompagnement de quelques projets innovants du Ministère. Des bulles extérieures thématiques regroupaient par ailleurs des innovations thématiques, sur l’Union européenne, par exemple, ou l’un des objets de réflexion principaux : le développement durable.
Le développement durable, thème privilégié par Bercy pour l'innovation en 2020 (photo E.Delsol)
Pour Marie-Anne Barbat-Layani, secrétaire générale des ministères économiques et financiers depuis le 1er décembre 2020, il s’agit d’impulser l’innovation en la partageant. « L’événement a une forte dimension de transformation de l’administration, ajoute-t-elle. Nous travaillons à la fois sur de nouveaux modes de travail et de nouvelles façons de rendre service aux usagers. »
La collaboration avec les startups et les usagers
L’équipe de impots.gouv.fr, par exemple, a retravaillé le design du site en collaboration avec les usagers, selon trois méthodes. Elle a d’abord analysé tous les commentaires spontanés, positifs et négatifs. Elle a par ailleurs invité les internautes à émettre des suggestions à chaque nouvelle version. Enfin, de façon plus proactive, elle a sélectionné un panel de 200 utilisateurs représentatifs qu’elle a filmé lors de leur navigation sur le site pour étudier leurs expressions.
Un système d’alerte directe de la DGCCRF pour les consommateurs
Parmi les projets présentés, Signal Conso est une startup d’État qui émane de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, consommation et répression des fraudes). Cette plateforme facilite le signalement par les consommateurs des problèmes qu’ils rencontrent avec les entreprises : hygiène, qualité, prix, etc. L’internaute signale en ligne le problème qui arrive simultanément chez le commerçant concerné, par exemple, et à la DGCCRF. Le premier peut répondre directement à son client pour régler la situation. Sinon, la DGCCRF intervient. Les bénéfices sont multiples. L’institution cible ainsi de façon plus précise les établissements dans lesquels une intervention est nécessaire. Les consommateurs disposent d’un guichet de réclamation unique. Et la DGCCRF peut également analyser les données globales pour mieux connaître son activité et les secteurs les moins respectueux des règlements, par exemple. Elle peut réagir avec des campagnes d’information ciblées. Le site fonctionne depuis un an dans les régions Auvergne-Rhône Alpes, Occitanie-Pyrénées Méditerranée, Centre-Val de Loire et a déjà reçu 3500 signalements. 77 % ont fait l’objet d’une réponse par l’entreprise incriminée.
Les Douanes ont créé une interface des différents SI pour faciliter le passage de la frontière franco-britannique après le Brexit (photo Douanes)
Une frontière intelligente pour accompagner les routiers après le Brexit
La frontière intelligente, projet des Douanes, se veut une solution pratique et efficace pour les quelque 5 millions de camions qui traversent chaque année la frontière entre le Royaume-Uni et le reste de l’Union européenne avec l’équivalent de 300 milliards d’euros de marchandises. À partir de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne le 31 janvier, les transporteurs routiers devront se préparer au rétablissement progressif des formalités douanières, des contrôles sanitaires, phytosanitaires et vétérinaires pour traverser la Manche (la mise en œuvre du Brexit prendra plusieurs mois). Pour autant, pas question de remettre en place des procédures longues et complexes à la frontière, qui provoqueraient de longues files d’attente de poids lourds. Depuis le vote britannique en juin 2016, le service des Douanes a réfléchi à une solution alternative, en l’occurrence une frontière intelligente, qu’une petite équipe a commencé à développer dès 2018.
Des documents appairés avec la plaque minéralogique
L’idée ? Concevoir une brique applicative qui s’interface via des API un côté, avec les systèmes d’information douaniers NSTI pour le transit, ECS pour le contrôle des exportations, etc.) et de l’autre côté, avec ceux des compagnies portuaires, des compagnies de ferry ou Eurotunnel, de l’autre. Le transporteur aura la possibilité d’anticiper l’envoi en ligne aux services du dédouanement des documents concernant les marchandises. Le chauffeur du camion recevra en retour, toutes les autorisations nécessaires, sous la forme d’un code-barre. Celui-ci représente un lien logique d’appairage entre les documents et la plaque minéralogique du véhicule. La compagnie de ferry ou Eurotunnel, par exemple, n’a plus qu’à scanner cette dernière au départ, et à étudier les documents pendant le trajet. À l’arrivée, le chauffeur reçoit un signal vert, si rien ne pose problèmes, ou orange si certains éléments demandent vérification à la douane. Il sait donc directement où se diriger. Seuls les poids lourds qui ne disposent pas de toutes les informations nécessaires feront l’objet d’un contrôle.
Bercy va utiliser les plans imprimés en 3D et sonores de Feel Object pour donner de l'autonomie aux visiteurs malvoyants (Photo E.Delsol)
Virtuoz, un plan sonore en relief et interactif pour aider les mal voyants à se situer dans un bâtiment
Parmi les innovations issues du secteur privé retenues par Bercy, l’étonnant Virtuoz de Feelobject. La startup a développé un plan de bâtiments en relief et sonore à destination des malvoyants. « Il ne s’agit pas d’un GPS, mais d’un dispositif pour les personnes qui ont déjà assimilé un lieu, mais refont toujours le même chemin par exemple, par sécurité, et ont besoin de points de repère pour mieux se projeter. » Le plan est une plaque noire sur laquelle sont représentés en relief et en rouge les escaliers, les toilettes… Appuyer sur un de ces reliefs déclenche une indication sonore adaptée et détaillée telle que « toilettes femmes, trois lavabos à droite, deux toilettes à gauche, et une toilette PMR (Personne à mobilité réduite) au fond ». Virtuoz, initialement spécialisé dans l’impression 3D industrielle, a décidé de se tourner vers des produits directement utiles à la société. Enedis, Orano et Veolia font déjà partie de ses clients. Certaines entreprises l’utilisent uniquement pour les visiteurs à l’accueil. Orano, lui, a mis un plan Virtuoz à disposition d’un salarié malvoyant, pour l’aider à se repérer en toute autonomie.
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