Principal opérateur télécoms avec la plus grande infrastructure cellulaire aux Etats-Unis, AT&T, qui vient d’annoncer le rachat de TimeWarner, est accusé de collaborer très étroitement avec les forces de police américaines. Le Daily Beast rapporte en effet que la compagnie propose des services à la carte aux forces de l’ordre nord-américaines désirant surveiller un individu ou un groupe sans passer par l’intermédiaire d’un juge. Moyennant rémunération et dans le cadre d’un programme baptisé Hemisphere, les bases de donnés d’AT&T, qui recensent toutes les communications et déplacements des clients de l’opérateur, sont accessibles sans aucun mandat. En fait, toutes les communications transitant par ses infrastructures étaient accessibles. Un volume représentant plusieurs milliers de milliards de métadonnées selon l’Electronic Frontier Fondation, supérieur à celui collecté par la NSA.
L'existence du projet Hemisphere est connu depuis 2013 suite à un article publié par le New York Times mais à l’époque, il était présenté comme un outil mineur utilisé par une poignée d'états pour des opérations anti-drogue. Si ces nouvelles révélations sont exactes, Hemisphere a changé d’échelle et toutes les forces de police du pays étaient en mesure de savoir où se trouve un individu, à qui il passait des coups de fil, avec tous les détails concernant les SMS, les emails, tchat Skype… non chiffrés. Toutes ces informations sont bien sûr disponibles avec un mandat délivré par un juge, mais AT&T proposait aux enquêteurs de payer pour obtenir ces données, quitte ensuite à recouper leurs informations avec d’autres sources pour apporter des preuves étayées à un juge. En réponse à ces accusations, très graves dans un état de droit, l’opérateur a répondu qu’il n’y avait « aucune base de données spéciale ».
Huit états américains utilisent la base de données spéciale
Mais selon The Daily Beats, huit états américains utilisaient et payaient rubis sur l’ongle le service Hemisphere d’AT&T avec leur budget fédéral. Et dans quelques états, un charmant nom de code était attribué à la base de données qui n’existe pas : Peach en Georgie, Sunshine à Hawaï… Mécontent de la mauvaise publicité engendrée par cette révélation, un groupe d’actionnaires d’AT&T a demandé des éclaircissements à l’opérateur afin de « clarifier les politiques de la société en ce qui concerne la fourniture d'informations à des forces de polices et des agences de renseignement, nationales et internationales, au-dessus et au-delà de ce qui est légalement requis par ordonnance d'un tribunal ou toute autre procédure légalement mandatée ». AT&T a contesté la proposition et la question est maintenant devant la Securities and Exchange Commission. En France, avec les boites noires installées chez les opérateurs et les FAI depuis l’adoption de la loi sur le renseignement portée par Axelle Lemaire, les passerelles sont encore plus fluides.
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