Pour Adobe, comme pour toutes les grandes entreprises, l’entrée en confinement de mars 2020 a entraîné l’organisation massive du travail à distance. En un week-end, 22 000 personnes sont passées des bureaux à leur domicile. « Nous avons réalisé très vite que la seule façon de répondre à leurs besoins était de repenser complètement notre infrastructure de support », explique aujourd’hui Cynthia Stoddard, vice-présidente senior et CIO d’Adobe, dans une tribune où elle tire le bilan de cette expérience, publiée par nos confrères de Venturebeat. Elle y expose comment l'intelligence artificielle et les robots conversationnels sont devenus en quelque sorte « une main-d'œuvre complémentaire » chez Adobe.
Très vite, un canal ouvert sur la messagerie instantanée Slack a relié d’emblée les utilisateurs aux équipes de support avec une escalade vers les équipes informatiques. Pour optimiser les réponses aux questions les plus fréquentes, un canal Slack « #wfh-support » (Work from home support) a combiné à travers un chatbot l’apprentissage machine (ML) et le traitement naturel du langage (NLP). Depuis le 14 avril, ce système automatique a répondu à plus de 3 000 requêtes et permis de router automatiquement 38% des tickets envoyés par email vers le bon support dans un délai de 6 minutes.
Une précision d'environ 97% sur le bot de routage
« Le robot IA qui fait le routage utilise une technique de classification basée sur un réseau neuronal pour répartir les tickets envoyés par mail entre des classes et des files d’attente », détaille Cynthia Stoddard. Le temps moyen de répartition et routage de ces tickets est passé de 10 heures à moins de 20 minutes. « Un entraînement supervisé en continu sur le bot de routage nous a aidé à atteindre une précision d’environ 97%, presque à égalité avec ce que ferait un expert humain », indique la CIO. Le volume d’appels pour le support interne en a été réduit de 35%.
Les réponses fournies et le taux de résolution du chatbot sont améliorées en examinant de façon continue les conversations du canal Slack. Des mots-clés sont ainsi identifiés pour affiner le fonctionnement du moteur à base de règles et améliorer l’entraînement du modèle NLP. De nouvelles réponses sont créées dans le chatbot pour répondre aux principaux problèmes rencontrés par les utilisateurs. « Nous réentraînons le modèle de réseau neuronal du bot de routage toutes les deux semaines en ajoutant au jeu d’entraînement de nouvelles données provenant des tickets résolus », précise la CIO. « Cela aide non seulement à identifier d’autres modèles de routage ou à les modifier, mais permet aussi au modèle de réapprendre et d’éviter les erreurs passées dans les prédictions à venir ».
Une expérience profitable pour la gestion du changement
La DSI d’Adobe a ensuite cherché à appliquer cet enseignement à d’autres cas d'usage. Ce type de chatbot à base d’IA est ainsi testé en interne lorsque se dégage une voie intéressante à explorer. Un centre d’excellence a été créé pour partager plus vite les connaissances acquises, par exemple pour utiliser le travail fait avec le canal Slack #wfh-support dans des robots de conversation appliqués à la finance ou à la relation avec les clients. Adobe évalue par ailleurs de quelle façon combiner IA et robots logiciels autonomes dans un autre domaine, celui de l’automatisation des processus robotisés (RPA).
Enfin, cette expérience a été essentielle à la firme américaine pour comprendre les problèmes liés à la gestion du changement, pointe aussi Cynthia Stoddard dans sa tribune. « Les gens doivent comprendre les technologies d’intelligence artificielle et de chatbots, pourquoi elles sont utilisées, comment elles peuvent les aider et comment leurs rôles peuvent changer ». Dans ce contexte, la formation des collaborateurs est critique pour qu’ils se sentent à l’aise et en confiance avec les changements introduits, estime la CIO qui explique qu’un programme de certification à l’IA et à l’apprentissage machine est mis en place (en l’occurrence avec un partenaire, Coursera) à l’attention des ingénieurs logiciels d’Abode au niveau mondial.
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