L’annonce faite par Google et Rackspace mercredi lors de l’OpenPower Summit qui se tient du 5 au 8 avril à San José, Californie, a de quoi frapper les esprits. Les deux fournisseurs cloud ont en effet annoncé concevoir un serveur, baptisé Zaius, basé sur le prochain processeur Power9 d’IBM, dévoilé pendant l'événement. Google et Rackspace prévoient de soumettre leur design à l’Open Compute Project, ce qui signifie que d'autres entreprises pourront l'utiliser. Depuis longtemps, les datacenters de Google fonctionnent avec des serveurs basés sur les processeurs x86 d’Intel, mais dernièrement, le géant de la recherche s’est intéressé à d’autres systèmes de serveurs basés sur des puces Power et ARM. Il y a deux ans, Google avait montré une carte serveur à base de puce Power développée par ses ingénieurs à des fins de test. Mais depuis, le géant de la recherche avait peu communiqué sur ces travaux.
Aujourd’hui, il est clair que Google compte vraiment utiliser la puce d’IBM dans son infrastructure. « Cela ne surprendra personne d'apprendre que la demande de Google en capacité de calcul est incessante, et qu’elle n’est pas près de ralentir de sitôt », a déclaré l’entreprise dans un blog. « Pour répondre à cette demande, les datacenters de Google doivent être capables de gérer l’hétérogénéité des architectures », a-t-elle ajouté, c’est-à-dire prendre en charge les jeux d'instructions de multiples architectures. C'est une révolution pour Google, qui historiquement a toujours cherché à limiter ses coûts en construisant l'infrastructure la plus homogène possible.
Des applications rapidement déployables sur Power
L'architecture Power est désormais « entièrement supportée par nos outils de compilation », a ainsi déclaré Maire Mahony, responsable de l'ingénierie du matériel chez Google et directrice de l’OpenPower Foundation. Autrement dit, les développeurs de Google sont en mesure de déployer rapidement des applications sur les systèmes Power. Celle-ci n’a pas voulu dire si l’entreprise faisait déjà tourner des applications de production sous Power. Mais elle a précisé que Google avait porté « beaucoup » d’applications maison pour la puce d’IBM.
Rendu du serveur Zaius co-développé par Google et Rackspace à base de puce Power9 d'IBM. (crédit : IBM)
Selon Aaron Sullivan, ingénieur distingué chez Rackspace, « les fournisseurs de cloud s’intéressent à la puce Power pour deux raisons : d’abord, la qualité de la CPU haute performance ; ensuite, parce que la loi de Moore ne peut plus à elle seule assurer des gains en performance suffisants d’une génération de processeurs à une autre ». Pour répondre à leurs besoins de performance, des entreprises comme Rackspace et Google cherchent des solutions plus souples qui leur permettent de repenser la conception de leurs serveurs », a-t-il expliqué, y compris de nouvelles façons de combiner la mémoire, l’I/O, et les puces accélératrices comme les GPU. « Et cela s’avère plus facile avec des puces Power qu'avec des puces x86, parce qu’IBM a ouvert la plate-forme et supprimé les restrictions d'octroi de licences qui restreignent les possibilités de modification du design par les clients et les fournisseurs ».
Aucune différence avec les systèmes x86 traditionnels
Cette annonce marque aussi une certaine volonté d'ouverture chez Google, d’habitude très discret sur les nouvelles technologies qu'il utilise dans ses datacenters. Le géant de la recherche estime désormais, semble-t-il, que le partenariat est davantage dans son intérêt. Le mois dernier, Google a rejoint l’Open Compute Project auquel il a soumis un design de rack serveur 48 volts co-développé avec Facebook. L'OCP permet à des utilisateurs finaux et à des fournisseurs de travailler ensemble sur de nouvelles infrastructures. À noter que le serveur Power développé par Google et Rackspace est compatible avec ce rack 48 volts.
Les spécifications de base de Zaius (crédit : James Niccolai)
Zaius est le nom d'un personnage du film « La planète des singes ». Le design de base est conçu pour un serveur avec deux processeurs Power9 et 32 connecteurs DIMM DDR4. Ce sont les seules caractéristiques dévoilées mercredi par les deux partenaires. Élément clé de ce design : la puce Power9 sera compatible avec les nouvelles interfaces à grande vitesse, notamment CAPI d'IBM et NVLink de Nvidia, ce qui permettra de connecter facilement le CPU à des accélérateurs de puce et à des GPU en particulier.
Il y a trois ans environ qu’IBM a lancé son initiative OpenPower. Pour redynamiser son activité Power, big blue a passé sa plate-forme en open source afin de permettre à des tiers de construire eux-mêmes des serveurs et des processeurs basés sur Power. Cette stratégie semble avoir été payante. Rackspace a déjà conçu un serveur basé sur Power, appelé Barreleye, lequel devrait passer en production dans les prochains mois pour prendre en charge des services cloud offerts aux clients du fournisseur. La puce Power est « la meilleure option en terme de haute performance et de coût pour les charges de travail tournant sous Linux », a encore estimé Aaron Sullivan. « Les clients ne voient aucune différence avec les systèmes x86 traditionnels quand leurs charges tournent sur des serveurs Power sous Linux ».
Intel loin d’avoir dit son dernier mot
L’ingénieur de Rackspace ne croit pas que Google et autres s’intéressent aux solutions Power d’IBM uniquement pour faire pression sur Intel et obtenir des réductions de prix. « J’aimerais vraiment que l’on cesse de raconter cette histoire, parce que ce n’est pas le cas », a-t-il déclaré. Évidemment, pendant ce temps, Intel ne reste pas sans rien faire. Le fondeur commercialise des puces Xeon personnalisées pour continuer à satisfaire les besoins de ses clients cloud, et le rachat d'Altera devrait lui permettre de développer des accélérateurs qu’il pourra intégrer à ses propres puces.
Mis à part le serveur Zaius, hier, pendant l’OpenPower Summit, d'autres entreprises ont annoncé des serveurs et des composants dans le cadre de l’initiative OpenPower. IBM travaille en direct avec le fabricant de serveur white-box, Wistron, pour développer un nouveau système HPC basé sur la plate-forme Tesla de Nvidia. Le serveur connectera directement des processeurs Power8 ç la carte graphique Tesla P100 Nvidia via NVLink. La participation de Wistron est importante, parce que les fournisseurs cloud comme Rackspace et Google aiment quand ils peuvent acheter leurs systèmes à moindre coût à des fabricants de serveurs taïwanais et chinois. Tyan, un autre fabricant de white-box, a annoncé qu'il avait mis au point un serveur 1U Power8. Par ailleurs, Mellanox, Xilinx et d'autres entreprises ont annoncé de nouveaux accélérateurs compatibles avec l'interface CAPI d'IBM.
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